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d’apostasier elle-même, sous peine de n’exercer qu’un pouvoir tyrannique contre lequel ils se soulèveront jusqu’au dernier.

À ces peuples, en les abordant, on a dit deux choses contradictoires : « Nous vous laissons votre culte, et nous voulons renverser le principe qui en est la base. Nous vous laissons vos lois et vos mœurs, et nous voulons que vous reconnaissiez un gouvernement fondé sur d’autres lois, sur d’autres mœurs. Vous faut-il un pontife ? Que ce soit le grand seigneur, le shah ou le sultan de Maroc, créez un personnage analogue au pape catholique. Changez donc votre culte en gardant votre culte. » Ils répondent à cette absurdité en massacrant nos frères et en se faisant massacrer eux-mêmes.

Si la France, pour toucher le but qu’elle se propose, se trouve forcée de laisser les peuples dépossédés rentrer dans leur état social, et se fonder un gouvernement selon leur foi, il est de son intérêt d’intervenir dans ce travail, de le diriger autant qu’il est possible, et de l’engager dans une voie où la civilisation puisse suivre pas à pas le nouveau peuple et l’atteindre. Abd-el-Kader ayant perdu tous ses droits à la protection de la France, Muley-Abderraman se trouve être définitivement le seul allié véritable qui puisse un jour nous aider dans cette grande œuvre.


A. Rey (de Chypre).