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LE MAROC ET LA QUESTION D’ALGER.

corvettes de 36 canons. Depuis cette époque, le sable n’a pas cessé de s’y amonceler ; il est à craindre qu’elle ne soit un jour accessible qu’à de petites embarcations.

Du côté de la mer, le Maroc n’est réellement vulnérable que sur trois points : Larache, la nouvelle Mamora et Rabat. Des trois, le plus important est Rabat. Le blocus et l’occupation de tout autre point, sur la Méditerranée comme sur l’Océan, ne serviraient à rien. Tanger et Tétouan seraient des positions avantageuses pour une puissance maritime ; mais, dans l’état actuel du Maroc, elles ne font pas plus que Mogador et Saffi partie intégrante de l’empire. L’histoire le prouve, l’empire a subsisté durant trois siècles, malgré l’occupation de tous ces points par le Portugal et par l’Espagne. Loin d’être étouffé par le blocus, il a fini par en triompher et le briser.

La nouvelle Mamora, petit château qui défend le passage et l’embouchure du Sébou, aujourd’hui ruiné, mais placé dans un site admirable ; Larache, ville populeuse et assez forte encore, assise sur l’embouchure du Lyxos, nous paraissent des points plus importans, parce qu’ils sont voisins de Fez.

Telles sont les défenses réelles et naturelles de cet empire. En 1765, la France tenta une démonstration contre Rabat et Salé. Un vaisseau, huit frégates, trois chebeks, une barque et deux bombardes tinrent constamment le large et n’obtinrent aucun résultat. L’escadre eût aisément pu bombarder la ville en se plaçant du côté de Rabat, à quelques encâblures de terre, dans un excellent mouillage par quinze brasses. Aujourd’hui l’emploi de la vapeur rendrait cette mesure encore plus facile et protégerait une escadre assaillante contre le vent du large, qui rend ordinairement l’appareillage difficile et dangereux.


Nous n’avons omis aucun des détails nécessaires à faire connaître les antécédens du royaume de Maroc, sa population, son maître actuel, les ressources matérielles sur lesquelles il peut compter, son caractère et ses penchans personnels.

Cherchons maintenant quelles seraient les ressources morales dont il disposerait, s’il voulait se montrer hostile ou à la France ou au marabout Abd-el-Kader, et quel est l’esprit de la population à laquelle il commande.