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GOMEZ.

L’expédition du général carliste Gomez à travers la Péninsule, dans les derniers mois de 1836, a été sans contredit un des épisodes les plus frappans de la dernière guerre civile espagnole. On s’est généralement étonné de voir reparaître, au milieu de notre siècle, une de ces aventureuses promenades militaires de la guerre de trente ans, qu’on ne devait plus croire possibles de nos jours, et qui ne le sont plus en effet qu’en Espagne. Le souvenir qui en est resté dans tous les esprits a quelque chose de la légende, tant l’imagination publique a été frappée de ce qu’il y a eu d’original et d’imprévu dans cette expédition.

Nous n’espérons pas reproduire ici, dans le récit rapide que nous allons faire de cette odyssée carliste, l’intérêt piquant de curiosité qu’elle a eu tant qu’elle a duré. Il est impossible de ressusciter cette attente générale, ces prévisions toujours excitées et toujours déçues, cette suite non interrompue de surprises, ces incertitudes, ces coups de théâtre soudains, ces exagérations même et ces affirmations contradictoires qui ont occupé et amusé l’Europe pendant six mois entiers. Sûr de succomber dans cette lutte contre des souvenirs encore vivans, nous ne l’essaierons pas. Nous voulons seulement, d’après des documens inédits et authentiques, porter le jour de l’histoire sur quelques faits obscurs et mal connus, et assigner à l’ensemble de cette campagne extraordinaire son caractère réel, qui s’est un peu effacé jusqu’ici dans son éclat romanesque. L’intérêt sérieux