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DE L’ÉQUILIBRE EUROPÉEN.

coup moins de s’agrandir que de faire rectifier les usurpations commises par tous les cabinets, sous l’invocation du principe de l’équilibre européen, depuis le traité de Westphalie. La France trouverait assurément bien moins son compte à porter ses frontières jusqu’au Rhin qu’à établir entre les peuples ces limites naturelles, et pour ainsi dire sacrées, si brutalement franchies, depuis deux siècles, au nom des convenances politiques. Si le monde s’organisait jamais selon les affinités véritables des races qui le composent, et si le travail de la nature cessait d’être contrarié par celui de la politique, qui ne voit que la compacte unité française s’élèverait incomparable en éclat comme en puissance au centre de toutes les nationalités rendues à elles-mêmes ? Supposez tel redressement qu’il vous plaira d’une grande iniquité séculaire, et vous trouverez que, sans rien ajouter à sa puissance matérielle, la France s’agrandira de tout ce qui pourrait être ôté à l’injustice et à l’oppression.

Que l’Allemagne et l’Italie réalisent un jour cette unité si vainement poursuivie depuis des siècles ; que la Pologne rejoigne ses membres épars sous son souffle immortel ; que la Belgique, s’asseyant dans sa jeune nationalité, obtienne le complément naturel de son territoire et joigne les riches cités commerciales du Rhin à leurs vieilles sœurs catholiques de l’Escaut et de la Meuse ; que la Grèce, délivrée par nos armes voie s’ajouter à son territoire et la Crète et Samos, et ces îles d’Ionie, perles brillantes de sa couronne ; supposez la question d’Orient résolue par une transaction équitable entre les intérêts indigènes qui se partagent l’empire ottoman, à l’exclusion des ambitions étrangères qui convoitent les magnifiques positions de Constantinople et d’Alexandrie ; parcourez à plaisir le monde de l’une à l’autre de ses extrémités ; soit que vous voyiez l’Espagne rendue à une liberté régulière et féconde, délivrée du signe de servitude qui depuis le congrès d’Utrecht pèse sur elle du haut du rocher de Gibraltar ; soit que vous vous figuriez les peuples du Gange ou ceux du Saint-Laurent redevenus maîtres de leurs destinées, comme ces autres colonies lointaines aidées par nous à devenir une grande nation ; allez plus loin encore dans vos espérances et dans vos rêves : représentez-vous l’Europe complétant par de larges stipulations diplomatiques le code ébauché au congrès de Vienne, proclamant la liberté des détroits et des mers, ouvrant à tous les pavillons le Bosphore, Suez, Panama, ces portes de trois mondes, et dites si de tous ces changemens il pourrait s’en consommer un seul qui ne déterminât pour la France un accroissement notable de puissance politique,