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DE LA MISE EN SCÈNE CHEZ LES ANCIENS.

sans doute, sur les murs des théâtres, et qui désespéraient les désœuvrés de Rome : Cum ludi intercalantur, dit-il[1] ; et Juvénal :

..... Quoties aulæa recondita cessant,
Et vacuo clausoque sonant fora sola theatro[2].

On voit combien il faut se garder de confondre, dans l’étude du théâtre antique, deux choses absolument dissemblables, les spectacles publics, religieux, nationaux, et les spectacles secondaires, exploités dans des vues de lucre par des entreprises particulières.

À Athènes, les frais considérables qu’exigeaient les fêtes religieuses, et, par suite, les concours scéniques, étaient partagés entre les choréges, qui pourvoyaient à l’entretien des chœurs, et la caisse des fonds théoriques, chargée de subvenir à toutes les autres dépenses. Le théâtre, comme étant une enceinte religieuse et même une partie de l’Hiéron de Bacchus, fut d’abord ouvert à tous et gratuit. Les jours de représentation, les citoyens, de grand matin[3], quelquefois même pendant la nuit[4], venaient occuper les gradins auxquels leur âge ou leurs fonctions leur donnaient accès ; mais, comme il s’élevait souvent des contestations et même des rixes, et que des étrangers et des esclaves s’emparaient quelquefois des places, on établit un prix d’entrée que l’on fixa d’abord à une drachme[5] ou six oboles[6], et qui servait au paiement de l’architecte chargé d’élever le théâtre, alors de bois et temporaire. Plus tard, on réduisit, par considération pour les citoyens pauvres, le prix des places à deux oboles[7], peut-être même à une[8]. Enfin Périclès, flatteur habile des passions populaires, fit rendre un décret qui enjoignait aux administrateurs du fonds théorique[9] de distribuer aux citoyens, avant chaque représentation, les deux oboles nécessaires au paiement de leur place[10]. Mais la démocratie athénienne ne s’en tint pas là : la caisse des fonds théoriques, qui s’alimentait, dans l’origine, de l’amodiation des terrains sacrés[11], de certaines amendes et de divers dons

  1. Senec., Quæst. natur., lib. VII, cap. XXXII.
  2. Juven., Sat. VI, v. 67, seq.
  3. Æschin., In Ctesiph.Xenoph., Memorab., lib. V, pag. 825.
  4. Schol., in Lucian. Tim., cap. XLIX.
  5. Lucian., Demosth. Encom., cap. XXXVI. — Harpocrat., Hesych. et Suid., voc. grc.
  6. Environ 92 centimes.
  7. Demosth., Pro coron., pag. 477.
  8. Ulpian., In Demosth. Olynth., tom. I, pag. 13. — L’abbé Barthélemy, Voy. du Jeune Anachars., tom. VI, chap. LXX, pag. 106.
  9. On les appelait ταμίαι ; ils étaient élus par le peuple aux grandes Dionysies. Il y en avait dix, c’est-à-dire un par tribu.
  10. Plutarch., Pericl., cap. IX.
  11. Isocrat., Areopag., II.