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DE LA MISE EN SCÈNE CHEZ LES ANCIENS.

Syracuse le coin de la reine Philistis, comme à Paris, du temps des gluckistes, le coin du roi. Quant à la tessère où se lit le mot Ἀδελφοὶ, plusieurs antiquaires ne la croient pas théâtrale[1], et, en effet, deux petites figures jumelles, qu’on voit au revers, n’ont aucune apparence scénique. Reste la tessère portant les mots Casina Plauti. Cette dernière, si elle existe et si elle est authentique, semble, je l’avoue, prouver l’opinion que je combats ; mais existe-t-elle ? M. Orelli, qui l’a admise dans son recueil, n’indique ni sur quelle matière elle est gravée, ni dans quel cabinet on la conserve. Il ne la donne que comme un modèle de tessère théâtrale, se bornant à renvoyer au Voyage à Pompéï de Romanelli, qui ne cite, lui non plus, ce monument que comme un échantillon, sinon composé de fantaisie, du moins tracé de souvenir.

Il est bien à regretter qu’aucune véritable affiche de spectacle ne soit parvenue jusqu’à nous ; un si précieux document aurait éclairci divers points d’antiquité restés obscurs. Nous saurions, par exemple, d’une manière certaine, combien on jouait de pièces en un jour, les époques des différens jeux, le prix des places, les heures des représentations, toutes choses sur lesquelles nous avons, sans doute, des renseignemens et des données, mais non pas précisément des certitudes.

Toutefois, comme à défaut d’affiches théâtrales nous possédons un assez grand nombre de didascalies, c’est-à-dire d’inscriptions destinées à perpétuer le souvenir des concours scéniques, nous allons, par l’étude de ces monumens, et à l’aide de divers autres textes, essayer de résoudre plusieurs des questions que nous venons d’indiquer, et tâcher de reconstruire, autant qu’il est en nous, une affiche de spectacle ancienne.

La fécondité des poètes qui ont illustré la scène grecque n’a été surpassée que par celle des grands dramatistes espagnols. Eschyle avait composé, suivant les uns, soixante et dix pièces[2], et, suivant

  1. Caylus, ouvrage cité, tom. IV, pag. 284. — Une tessère, gravée dans le même recueil (tom. III, pag. 284, pl. LXXVII, 2), présente d’un côté les chiffres indicatifs du gradin, et de l’autre un masque comique. Je ne crois pas, avec Caylus et Millin (Dict. des Beaux-Arts, tom. II, pag. 413), que cette tessère annonçât plus particulièrement la représentation d’une comédie. Ce masque indiquait seulement, suivant moi, que ce billet d’entrée ne se rapportait ni au cirque, ni à l’amphithéâtre, mais au théâtre.
  2. Æschyl. vit., ed. Robort. — Les grammairiens nous ont conservé les titres de soixante et douze pièces d’Eschyle. — V. Stantl., Catalog. dramat. Æschyli.