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PHILOSOPHIE CONTEMPORAINE.

donne ? Que serait-ce, non-seulement dans l’âme, mais en toute chose ? Le substrat passif des phénomènes n’est qu’une abstraction réalisée par l’imagination, et il n’y a de réalité véritable que dans l’activité interne de l’Esprit.

On veut le réduire aux phénomènes, lui en interdire le fonds intelligible, la substance. Et le fonds, la substance, au contraire, c’est l’Esprit lui-même, dont la nature est de s’entendre et de se posséder. Ce qu’il conçoit au-dessus et au-delà de la Nature, c’est ce qu’il voit en lui, et ce qu’il voit, c’est ce qui est lui-même. « Car l’Esprit n’est pas l’invisible, mais le seul visible. » N’est-il pas temps qu’il renonce enfin à se chercher hors de lui, dans son œuvre, l’idole de la matière inerte, et reconnaisse en lui le principe universel, la substance, l’essence, comme la cause première de toutes choses ? — Dépouillé de sa domination légitime, chassé de son propre centre, exilé de lui-même, il semble se mourir aujourd’hui dans le vide et dans le doute. Il retrouvera, rentré en possession de lui-même, la foi qui fait la vie.


Félix Ravaisson.