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sur les autres arrangemens territoriaux à faire en Allemagne, non plus que sur l’établissement de la constitution germanique. Le principe avait été posé d’une manière vague et générale par l’article du traité de Paris où il était dit : « Les états de l’Allemagne seront indépendans et unis par un lien fédéral. » Restait à savoir de quelle nature serait ce lien, jusqu’où irait cette indépendance, et de quelle manière les deux choses se concilieraient. Les cinq principales puissances allemandes, l’Autriche, la Prusse, la Bavière, le Wurtemberg et le Hanovre, qui de sa propre autorité avait changé le bonnet électoral en couronne royale[1], se réunirent pour délibérer sur cette importante et difficile question. Les autres états, dont les souverains ne portaient pas le titre de roi, ne furent pas admis à ce conseil, à leur grand mécontentement, et formèrent avec les villes libres une seconde assemblée des actes de laquelle on ne paraissait pas vouloir tenir beaucoup de compte. Plusieurs projets furent successivement présentés dans le comité des cinq cours. Malgré le vœu d’une partie des populations et de quelques princes du second ordre, l’idée de rétablir la dignité impériale fut abandonnée dès le principe. La maison d’Autriche, pour laquelle cette dignité n’avait été dans les derniers temps qu’un fardeau et un obstacle, n’était pas disposée à la reprendre à des conditions plus défavorables encore que celles que présentait la constitution de l’ancien empire ; or, elle savait bien qu’il n’était pas possible d’en obtenir d’autres avec des électeurs, devenus rois, qui, aux termes des traités, réclamaient l’indépendance absolue et la plénitude de la souveraineté. Cette indépendance et cette souveraineté n’étaient guère compatibles avec la notion même d’état fédératif qui implique de la part de chaque membre l’abandon d’une portion de ses droits au profit de la communauté ; mais les princes du second ordre surtout ne voulaient pas entendre parler de concessions sur cet article. On proclamait à haute voix la nécessité d’un lien étroit entre les membres du corps germanique, mais on ne consentait à rien de ce qui eût été nécessaire pour resserrer ce lien. L’Autriche et la Prusse voulaient un système qui plaçât la confédération sous leur influence égale[2], et qui leur donnât, tant qu’elles

  1. Le roi de Saxe, dont les états étaient sous le séquestre, et dont le sort n’était pas fixé, ne fut pas admis à prendre part à ces délibérations.
  2. « Sa majesté impériale, écrivait le prince de Metternich au prince de Hardenberg, vise à établir l’équilibre le plus complet entre l’influence que l’Autriche et la Prusse se trouveraient appelées à exercer en Allemagne. » (Lettre du 22 octobre 1814.)