Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/641

Cette page a été validée par deux contributeurs.
637
L’HINDOUSTAN. — AFFAIRES DE CHINE.

De là ses tentatives pour arriver à étendre et à assurer ses communications avec les contrées situées à l’est de la mer Caspienne. La plus importante de ses expéditions avait eu lieu sous Pierre-le-Grand. Le prince Bekevitche, envoyé à Khiva avec un détachement de soldats, fut assassiné avec toute sa troupe, malgré la foi des traités et des sermens. Une partie de son corps d’armée, qui avait été cantonnée sur les bords de la mer Caspienne pour y former des établissemens fortifiés, fut obligée de se rembarquer et de s’en retourner à Astrakhan. En 1813, près d’un siècle avait passé sur ces évènemens, et la Russie confia à un marchand arménien de Derbend une mission en Tourkomanie, qui n’eut aucun résultat important. En 1819, le capitaine Mouraviev fut envoyé à Khiva : il a publié une relation intéressante de son voyage[1]. L’importance de la possession de Khiva avait fortement frappé Mouraviev, qui ne semblait pas regarder comme douteux le succès d’une expédition dirigée contre ce petit état. « Si nous possédions Khiva, dont la conquête ne serait pas difficile, dit M. Mouraviev, les nomades du centre de l’Asie auraient redouté notre puissance, et il se serait établi une route de commerce par le Sind et l’Amou-Déria jusqu’en Russie ; alors toutes les richesses de l’Asie auraient afflué dans notre patrie, et nous eussions vu se réaliser le brillant projet de Pierre-le-Grand. Maîtres de Khiva, beaucoup d’autres états se seraient trouvés sous notre dépendance. En un mot, Khiva est en ce moment un poste avancé qui s’oppose au commerce de la Russie avec la Boukharie et l’Inde septentrionale ; sous notre dépendance, la Khivie serait devenue une sauvegarde qui aurait défendu ce commerce contre les attaques des peuplades dispersées dans les steppes de l’Asie méridionale. Cette oasis, située au milieu d’un océan de sable, serait devenue le point de réunion de tout le commerce de l’Asie, et aurait ébranlé jusqu’au centre de l’Inde l’énorme supériorité commerciale des dominateurs de la mer. La route de Khiva à Astrakhan pourraît être de beaucoup abrégée, puisqu’il n’y a que dix-sept jours de marche d’Ourghendj à la baie de Krasnovodks, d’où, par un vent favorable, on peut aller en peu de jours à Astrakhan. »

En 1820, des envoyés de Bôkhara ayant exprimé le désir de voir une ambassade russe se rendre dans leur pays, ce vœu fut accueilli par l’empereur Alexandre, qui nomma son chargé d’affaires auprès

  1. Voyages en Tourkomanie et à Khiva, etc., revu par MM. G.-B. Eyriès et J. Klaproth ; Paris, 1823, in-8o.