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L’HINDOUSTAN. — AFFAIRES DE CHINE.

doustan de l’est à l’ouest, n’a pas moins de 1650 milles anglais d’étendue (environ 680 lieues de poste) ; c’est la distance qui, en Europe, sépare Bayonne de Constantinople. Le triangle septentrional a son sommet à Léh, sur l’Indus supérieur ; le triangle méridional a le sien au cap Comorin. La ligne qui joint les deux sommets n’a pas moins de 1975 milles (ou environ 815 lieues de poste, c’est-à-dire que la distance entre ces deux points est à peu près la même que celle qui sépare Bordeaux de Moscou, ou Naples d’Arkhangel). La surface totale des deux triangles est à peu près égale à la moitié de la superficie de l’Europe continentale, moins la péninsule scandinave. Le triangle du nord contient trois fois la superficie de l’empire d’Autriche, celui du sud trois fois celle de la France. Les côtés du triangle du nord sont formés par de hautes chaînes de montagnes ; le centre est occupé par de basses vallées ou des plaines immenses. Dans le triangle du sud, au contraire, les côtés sont des terres basses, étroites, tandis que le milieu est rempli de montagnes ou de hauts plateaux. Le contraste est complet sous le point de vue astronomique, comme sous celui de la configuration plastique des surfaces. La base commune à ces triangles est formée en grande partie par la vallée de la Narbaddah, au pied des monts Vindhya ; aussi ces montagnes et la rivière la Narbaddah ont-elles une grande importance absolue et traditionnelle, comme partageant l’Hindoustan en deux parties qui se distinguent l’une de l’autre non moins par leur aspect physique que par le caractère, le langage et les mœurs des peuples qui les habitent, et par les souvenirs religieux ou historiques qui se rattachent à chacune d’elles. La partie septentrionale, ou Hindoustan propre, portait chez les anciens brâhmes le nom de terre civilisée et sacrée, parce que la tradition voulait qu’elle eût été fréquentée par les dieux. La partie méridionale, ou le Dekkan (Dakkann), était seulement appelée terre civilisée[1]. Le Dekkan a aussi ses contrastes qu’il faut au moins désigner à l’étude, et dont l’influence ne saurait être méconnue. Ses côtes de l’est et de l’ouest étant tournées vers des mers animées par des courans et des systèmes de vent très différens, les courans d’air, les eaux, les productions, les peuples eux-mêmes, diffèrent sur l’une et l’autre plage, et à ces différences correspondent des besoins et des échanges, en un mot des relations commerciales d’un caractère distinct.

Résumons en peu de mots ce que l’on sait aujourd’hui sur l’aspect

  1. Voyez Exposition of the pratical operation of the judicial and revenue systems of India, etc., by Rajah Rammohun-Roy, London, 1832, in-8o.