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ou Bhârat-Varsha (contrée ou pays de Bhârat), du nom d’un prince issu de la race lunaire, fils de Doushmanta et de Sacontala. Suivant eux, le Bhârat-Varsha est borné au nord par l’Himalaya, au sud par la mer, à l’est en partie par la mer et en partie par les chaînes de montagnes qui le séparent des pays connus aujourd’hui sous les noms d’Assâm, Cassay, Arracân, à l’ouest enfin par l’Océan et par les chaînes de montagnes qui séparent ces contrées de l’ancienne Perse et s’étendent jusqu’aux bouches de l’Indus ; montagnes que les géographes modernes désignent par le nom de Monts-Soliman, et que les plus anciens auteurs hindous considéraient comme une continuation de l’Himalaya, mais qui sont par le fait dépendantes du plateau de l’Irân, dont elles constituent le bord oriental. D’après ces données, traduites en géographie mathématique, l’Inde continentale des anciens, envisagée sous le point de vue de ses limites extrêmes, s’étendait du 8me  au 35me degré de lat. N., et du 65me au 91me degré de long. orientale (méridien de Paris).

L’empire moghol, sous Aurengzeb, a dépassé ces limites en longitude ; mais plusieurs états du sud n’étaient pas soumis au joug musulman.

L’empire hindo-britannique, au contraire, embrasse tous ces états, ainsi que l’Inde centrale (dont quelques districts ne reconnaissaient qu’imparfaitement la domination des empereurs moghols), mais il ne s’étend au nord que vers le 31me et à l’ouest que vers le 68me degré ; à l’est, il atteint le 91me degré de long., et plusieurs provinces réunies dans ces dernières années aux territoires de la compagnie, comme Assâm, Arrâcan, Tavoy, Tannasserim, Singapour, Malacca, etc., sont situées bien au-delà de ce méridien. La grande presqu’île hindoustanique, par sa position intermédiaire à l’égard des peuples de l’Asie postérieure d’un côté, et des Arabes de l’autre, se trouve dans des conditions analogues à celles où se trouve l’Italie entre la Grèce dans l’est et la Péninsule ibérique dans l’ouest. On ne l’approche que par de vastes surfaces de mer, ou en traversant des chaînes de montagnes d’un passage difficile[1]. Envisagée dans son ensemble, cette vaste contrée offre, suivant la belle remarque de W. Jones[2], la figure d’un quadrilatère qui se divise en deux immenses triangles dont la base commune est la ligne de jonction des bouches de l’Indus à celles du Gange et du Brahmapouttra. Cette ligne, comprenant toute la largeur de l’Hin-

  1. Voyez, pour le développement scientifique des formes de transition de la Haute-Asie aux basses terres de l’Inde antérieure, Ritter, tom. V, pag. 424 et suiv.
  2. Discours d’ouverture de la société asiatique de Calcutta, 1786.