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RÉFLEXIONS POLITIQUES.

velléités d’arrangemens avec la Russie de la part de lord Palmerston qui ne fut pas secondé par les autres membres du cabinet, et entre la France et l’Angleterre un certain refroidissement qui est moins l’ouvrage de M. de Brunow que le résultat de la conduite du dernier cabinet. Les avertissemens ne lui avaient cependant pas manqué, et nous-mêmes, dans ce recueil, nous lui disions un mois après son installation : Dans la mer de Marmara, nous pourrions avoir quelque jour contre nous la Russie et l’Angleterre[1]. Toutefois, les journaux ont beau sonner l’alarme, il n’y a rien de plus à cette heure que des négociations, et ce n’est que trop déjà. Quant au titre que M. de Brunow vient de recevoir de sa cour, l’habileté du cabinet russe ne pouvait faire moins pour lui. On eût avoué un insuccès, en le renvoyant à Stuttgard, et M. de Brunow eût été sans doute même nommé ambassadeur à Londres si les égards commandés par la situation du comte Pozzo permettaient de disposer de ce titre de son vivant.

La position du gouvernement vis-à-vis du cabinet anglais est difficile sans doute, et la question assez haute pour absorber tous ses soins et toute son attention. Il s’agit de la prospérité commerciale de la France, de la paix du monde, de l’avenir de la liberté. N’aggravons pas les obstacles autour d’un ministère qui réunit quelques conditions heureuses, et dont le chef, outre sa capacité, peut trouver, pour accomplir sa grande tâche, un surcroît de force dans la confiance que lui témoignent tous les partisans de l’alliance anglaise. La présence de M. Guizot à Londres, le noble empressement avec lequel il seconde les efforts d’une administration où un esprit moins élevé que le sien aurait pu se croire un rival, sont encore un gage de sécurité et d’espoir. En voyant la réunion dans un même but de deux intelligences aussi éminentes, il nous semble qu’on doit croire au prochain rétablissement de tous les bons rapports qui existaient entre la France et l’Angleterre, en même temps que le caractère notoire de ces deux hommes d’état ne permet pas de supposer que leurs efforts de conciliation puissent être accompagnées de circonstances humiliantes pour la France.

  1. Livraison du 1er juillet 1839.