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DE LA MISE EN SCÈNE CHEZ LES ANCIENS.

Un poète est couché sur un cliné où sont posés trois masques. Devant et à côté l’on voit deux acteurs debout, et qui semblent attendre la détermination que va prendre le didascale[1].

Quand, après la guerre du Péloponnèse, les compagnies de comédiens eurent un copiste attitré, γραμματεύς[2], et même un sous-copiste[3], chargés de la transcription des rôles, non-seulement les poètes continuèrent de distribuer les masques, mais ils remettaient en outre aux comédiens des tablettes ou triptyques renfermant la figure du personnage qu’ils leur donnaient à représenter[4]. Plusieurs peintures antiques nous introduisent dans le cabinet d’étude et de toilette, ou, si l’on veut, dans la loge des acteurs grecs et romains. Là nous les voyons soit méditant profondément devant leur masque[5], soit tenant à la main un livre ouvert ou un rouleau, qu’on peut supposer être leur rôle[6], soit occupés de leur parure et prenant soin de composer leur costume sur le petit modèle dont nous venons de parler, modèle qui fixait et éternisait, pour ainsi dire, la pensée du poète, plus sûrement que ne font chez nous les vagues souvenirs d’avant-scène et de coulisses appelés la tradition.

Après la distribution des rôles venaient, comme de nos jours, la mise à l’étude et les répétitions.

RÉPÉTITIONS.

Dans les premiers temps, l’absence des rôles écrits força les poètes dramatiques à continuer l’usage établi par les cycliodidascales, d’enseigner de vive voix les choreutes. On appliqua, pour la même cause, ce mode d’enseignement aux comédiens. Voici comment les choses se passaient. Le poète, entouré de ses acteurs, récitait ou lisait la pièce. Chaque comédien, à son tour, répétait ce qui appartenait à son rôle, en imitant les inflexions qu’y avait mises le didascale. Cet exercice se continuait jusqu’à ce que le maître (doctor) fut parfaitement satisfait. Cela s’appelait en Grèce διδάσκειν τα δράματα, et chez les Romains docere fabulas. À cette expression relative au poète répondait celle de discere ou condiscere, relative aux acteurs. La pièce, ainsi apprise

  1. Winkelm., Pierres gravées du baron de Stosch, n. 1309.
  2. Boeckh., Inscript., tom. II, fascic.2, n. 2758.
  3. Pseudo-Plutarch., Vit. X orator. Eschin, pag. 840, A.
  4. Le Pittur. antich. d’Ercol., tom. IV, tav.XXXIX.
  5. Raspe, Tassie’s catal., n. 3541-3556. — Le Pittur. antich. d’Ercol., ibid., tav. XL.
  6. Ficoron., Le masch. scen., tav. LXXV. — Cf. Winkelm., Monument. antichi ined., tav. CXCII.