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accomplir de si grandes choses, les émigrans des États-Unis l’ont introduit au Texas. Depuis 1836, le congrès texien a autorisé, dans chaque session, la formation de plusieurs compagnies pour la construction de chemins de fer entre les principaux foyers de production et de commerce. Le pays s’y prête merveilleusement : le terrain ne coûte rien, la main d’œuvre seule est dispendieuse ; mais comme on n’a pas, en Amérique, la manie de faire du monumental, les lignes projetées se termineront vite et s’étendront bientôt de la frontière des États-Unis à celle du Mexique. Le congrès vient de voter un emprunt considérable que le général Hamilton, de la Caroline du Sud[1], sera probablement chargé de négocier en Europe. Une partie de cet emprunt est destinée à seconder, par voie de subside et d’association, l’accomplissement des travaux publics de l’état, suivant le système appliqué avec tant de succès dans l’Ohio, la Pensylvanie et l’état de New-York. En même temps le congrès s’occupe d’activer et de faciliter les communications avec le nouveau Mexique, pays immense, aussi négligé par l’ancien gouvernement espagnol que par la moderne république mexicaine, et dont le Texas doublera les richesses en lui offrant le débouché de ses ports.

Le gouvernement de Mexico n’a pas encore reconnu l’indépendance du Texas, et paraît quelquefois espérer qu’il lui sera possible de reconquérir une province qu’il n’a pas su défendre. C’est une ridicule illusion de la vanité nationale. Le Mexique, épuisé, n’a pas trois mille hommes à mettre en campagne sur le Rio-Bravo-del-Norte, qui restera la limite occidentale du Texas, à moins toutefois que de nouveaux succès ne portent le drapeau texien jusqu’à Matamoras[2].

  1. Le général Hamilton, de la Caroline du sud, est un des plus anciens et des plus chauds partisans que la cause du Texas ait trouvés aux États-Unis. MM. Clay, Calhoun, Benton, Chittenden, membres du congrès de Washington, ont des fils, des neveux et des gendres parmi les citoyens du Texas. Les habitans les plus distingués de la république sont pour la plupart venus des deux Carolines, de la Georgie et de la Floride, comme le président Lamar, le juge Burnet (tous deux de familles françaises émigrées à l’époque de la révocation de l’édit de Nantes), le colonel Bee, ex-secrétaire d’état, son successeur, M. Webb, etc.
  2. Ce n’est pas une armée texienne proprement dite, comme nous l’avons imprimé par mégarde dans notre premier article, qui s’est emparée de la petite ville mexicaine de Mier, sur la rive droite du Rio-del-Norte, mais un détachement de volontaires du Texas qui s’est joint à une troupe d’insurgés fédéralistes. Il paraît même que le président Lamar a désapprouvé cette expédition. Néanmoins l’état de guerre existe toujours entre le Mexique et le Texas, bien que le gouvernement de cette dernière république ait pu vouloir rester sur la défensive et consacrer à l’exploitation intérieure tous ses bras et tous ses capitaux disponibles.