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vive opposition à ce que Santa-Anna fût mis en liberté ; Houston crut que l’honneur lui faisait un devoir de relâcher son prisonnier, et le fit conduire aux États-Unis. Enfin, il persista dans le désir de rattacher le Texas à la confédération anglo-américaine, quand déjà les Texiens, mécontens d’avoir été repoussés par le cabinet de Washington, mettaient leur orgueil à former une république séparée, dont la grandeur et la prospérité fissent un jour envie à leurs puissans voisins. Cette opinion d’Houston mit le comble à son discrédit, comme l’opinion contraire attira les suffrages sur Mirabeau Lamar, aux élections présidentielles de 1838.

En effet, le Texas n’avait pu faire admettre son étoile dans la grande constellation vers laquelle il s’était senti attiré par une communauté d’origine, d’institutions et d’intérêts. Au risque d’une guerre avec le Mexique, les États-Unis avaient reconnu l’indépendance du Texas, dès que le gouvernement de ce pays eut reçu son organisation définitive ; mais de puissans motifs empêchèrent le cabinet de Washington de proposer au congrès l’incorporation du nouvel état. L’audacieux Jackson eût peut-être bravé les dangers de cet agrandissement ; le prudent Van-Buren ne voulut point ajouter cet embarras de plus à tous ceux que lui léguait son prédécesseur. La nécessité de maintenir l’équilibre, pour maintenir l’Union elle-même, entre les états à esclaves et les états qui ont proscrit l’esclavage, entre les états agricoles du sud et les états industriels du nord, entre la vallée du Mississipi et les états primitifs, prévalut sur les conseils de l’ambition. L’opinion abolitioniste attaqua les Texiens sans ménagement et se prononça contre l’admission du Texas dans l’Union avec une extrême vivacité. M. Adams, du Massachussets, fit de cette question, dans la chambre des représentans, l’objet d’un discours très passionné, mais plein de force, qui retentit au sein du parlement anglais et ne fut pas sans influence sur la résolution du cabinet de Washington. L’Angleterre elle-même, on n’en saurait douter, agit auprès du gouvernement des États-Unis pour le déterminer à repousser les offres du Texas, dont elle n’a pas encore reconnu l’indépendance, tant la création et le caractère de cette république lui paraissent de nature à affecter la balance des forces politiques dans le Nouveau-Monde. Bientôt d’ailleurs quelques-uns des états qu’on aurait pu croire le plus favorables à l’incorporation du Texas se refroidirent à cet égard pour des causes diverses, parmi lesquelles les intérêts matériels tenaient aussi leur place. Le Texas a donc solennellement retiré sa demande. Il ne perdra rien à de-