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SALON
DE 1840.

Chaque année le jury du Louvre soulève des plaintes nombreuses ; sans admettre que tous les ouvrages refusés par le jury aient des droits à l’estime publique, nous sommes forcé cependant de croire qu’il se trouve parmi ces ouvrages plus d’un morceau recommandable. Il est arrivé, en effet, à des artistes éminens, qui ne partagent pas les convictions du jury, de se voir exclus des galeries du Louvre. Il y aurait un moyen bien simple d’imposer silence à toutes les plaintes, ce serait d’admettre indistinctement tous les ouvrages présentés ; et pour circonscrire l’exposition dans des bornes raisonnables, on ne permettrait pas aux peintres et aux statuaires de présenter plus de deux ouvrages. Tant qu’on n’adoptera pas le système que nous indiquons, les artistes seront exposés à d’inévitables injustices. Il est impossible en effet que M. Blondel approuve la peinture de M. Delacroix, et pourtant, malgré ses défauts, M. Delacroix est un peintre éminent, tandis que M. Blondel est un peintre absolument nul, bien qu’il siége dans la quatrième classe de l’Institut. M. Bidauld ne peut approuver les paysages de M. Huet ou de M. Rousseau, et pourtant MM. Huet et Rousseau ont une valeur incontestable, tandis que M. Bidauld ne signifie rien dans l’histoire de son art, quoiqu’il siége dans la quatrième classe de l’Institut. Le système que nous indiquons est donc le seul que la raison avoue, le seul qui puisse contenter tout le monde, et qui soit sans danger pour le développement de l’art.