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Kandahar sur Kaboul. Un service de postes est aujourd’hui établi entre Calcutta et Kaboul, en passant par le Pandjâb et la passe de Khayber. Les monts Khaybers courent de l’est à l’ouest, vis-à-vis de la projection septentrionale du Hindou-Khou, dont le sommet le plus élevé paraît atteindre 6,000 mètres (le Kound d’Elphinstone, le pic Kouner de Burnes). Ces deux séries de montagnes forment un passage étroit que le fleuve de Kaboul perce près de Djellalabad, pour passer de son gradin supérieur de Kaboulistan sur le gradin inférieur de Peschaver, qui se lie au plat pays de l’Indus.

C’est cette même contrée montagneuse vers le haut Kound, contrée dans laquelle Alexandre-le-Grand pénétra par la vallée de Kouner, le long du fleuve Kaméh, qui porte le nom de Hindou-Khou ou Hindou-Kôh, strictement parlant. Le nom de Hindou-Koush, qui a de l’analogie avec le premier et qui souvent est confondu avec lui, ne se rapporte qu’aux passages plus occidentaux entre Bâmiân et le pays de Balkh. D’après Ibn-Batuta[1], qui franchit ces passes vers le milieu du XIVe siècle, l’étymologie de Hindou-Koush se déduit de la destruction causée par le froid parmi les Indiens qu’on traînait en esclavage dans la Bactriane, et qui trouvaient la mort dans ces montagnes. Hindou-Koush signifie, en effet, mot à mot, destructeur ou tueur des Hindous[2].

Toute cette contrée au nord du fleuve du Kaboul fut le théâtre de combats livrés par l’une des divisions de l’armée d’Alexandre. Elle est désignée aujourd’hui sous le nom de Kohéstân de Kaboul (Koh-é-stân, c’est-à-dire pays de montagnes), et ses hauteurs avancées, du côté du fleuve, sous le nom de Kohdamaun. L’ensemble de ces contrées, à partir de la rive gauche du fleuve de Kaboul, peut se diviser en trois régions : dans les basses plaines les plus chaudes se sont établis les Afghans proprement dits ; dans les vallées moyennes, les Youssouf-Zaïs, dont nous aurons occasion de parler bientôt ; les hautes vallées presque inaccessibles de la chaîne géante sont ha-

  1. Ibn-Batuta, savant cheik et célèbre voyageur, florissait à la cour de l’empereur de Delhi, Mahmoud-Toghluk, vers 1340. — Les voyages d’Ibn-Batuta ont été traduits de l’arabe par le révérend Sam. Lee, Londres, 1829, in-4o.
  2. Ces passages sont les six mesurés par Burnes, et qui atteignent de 3,350 à 4,000 mètres environ de hauteur. — Les observations de Burnes prouvent que Bâmiân se trouve déjà au nord de la ligne de partage des eaux entre l’Indus et l’Oxus. Mohan-Lall, jeune Hindou, qui accompagnait MM. Burnes et Gerard dans la première mission à Kaboul, et qui a publié une relation intéressante de ses voyages (Journal of a Tour, etc., Calcutta, 1834), donne la même étymologie du mot Hindou-Koush ; mais, selon lui, la tradition rapporte qu’une armée hindoue aurait péri tout entière dans ces montagnes.