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d’instruction, dirigés par des hommes plus capables de propager les sciences et d’aider à leurs progrès. Excepté l’Institut et le Bureau des longitudes, ces divers établissemens sont destinés à l’enseignement public ou à l’instruction d’une classe particulière d’auditeurs, et (sauf le Conservatoire des arts et métiers) ils sont consacrés à l’enseignement supérieur. Quant à l’Institut, vous le savez, monsieur, ce n’est pas seulement une académie, c’est un tribunal, un aréopage composé des hommes les plus éminens du pays, qui, tout en contribuant au progrès des lumières par leurs travaux, sont encore chargés de juger en dernier ressort les ouvrages des autres savans, de distribuer le blâme et la récompense, de désigner à l’attention du gouvernement et de la nation les jeunes talens qui s’élèvent, de présenter des candidats pour les places scientifiques les plus importantes, de diriger en un mot la marche des sciences dans toute l’étendue de la France.

Investi de ces prérogatives, l’Institut est devenu un des grands corps de l’état et presque un corps politique, et il était impossible qu’il en fût autrement ; car, composé comme il l’est aujourd’hui (après plusieurs remaniemens dus aux révolutions politiques qui n’ont cessé de se succéder depuis sa création) de cinq académies qui réunissent tout ce que nous avons d’hommes supérieurs dans les sciences, dans les lettres, dans la politique, dans les arts, jouissant depuis plusieurs années du privilége de donner à l’armée des chefs tels que Bonaparte, au gouvernement des ministres comme Talleyrand et Carnot, à la chambre des orateurs tels que Guizot et Thiers, il a étendu partout ses racines et s’est créé une force morale qu’il serait impossible de méconnaître. C’est donc par l’Institut, qui se trouve à la tête des autres corps savans, que je devrai commencer cet examen.

D’après la pensée qui a présidé à sa formation, l’Institut doit être considéré comme un corps unique destiné à montrer, par son organisation et ses travaux, que toutes les branches des connaissances humaines sont liées intimement entre elles, et qu’il n’existe qu’une seule et grande science qui a tour à tour pour objet la recherche du vrai, du beau et du bon. Cependant, malgré cette unité primitive, les liens qui attachaient les différentes académies de l’Institut s’étant relâchés par diverses circonstances, elles ont cessé peu à peu de se réunir et de vivre en commun ; chacune d’elles a adopté un réglement particulier, et leurs rapports avec le public se sont tellement modifiés, qu’il serait impossible de parler avec quelque certitude des travaux intérieurs des académies qui n’admettent point d’étrangers