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L’INDUS. — LE SINDH.

tance. Des préjugés religieux qui ne sont pas indignes d’attention, se rattachent également à ce nom qui a été imposé non-seulement au lieu, mais au fleuve. Attock signifie empêchement, obstacle, arrêt. Or, d’après les idées traditionnelles, il y a empêchement à ce qu’un Hindou orthodoxe traverse la rivière d’Attock ou même le Sindh ou Indus en général. Cependant nous ne pouvons affirmer que la formule prohibitive qui spécifie cet empêchement existe dans l’un des livres sacrés. Quoi qu’il en soit, il est admis parmi ces mêmes Hindous orthodoxes que l’empêchement cesse immédiatement au-dessus du confluent des rivières d’Attock et de Kaboul. Les Brahmanes du Radjpoutâna et ceux qui habitent l’Afghanistan traversent d’ailleurs le fleuve sans beaucoup de scrupule ; et on a vu que les soldats hindous, qui formaient la plus grande partie de l’expédition anglaise dans l’Afghanistan, ont franchi, avec la même ardeur et le même empressement que les troupes européennes, le double obstacle que leur présentait l’Indus. Il faut remarquer, à ce sujet, que l’Indus, malgré son antique célébrité, son importance, et bien qu’il figure parmi les fleuves sacrés, n’a jamais eu, dans l’opinion des Hindous, le caractère de sainteté qu’ils reconnaissent à d’autres rivières, même d’un cours très borné. Les causes de cette espèce d’interdiction dont le passage de l’Indus est frappé, nous paraissent d’ailleurs se rattacher au grand système d’isolement qui fait la base des institutions brahmaniques, et dont le but était surtout de garantir les quatre castes pures du contact des Metchas (barbares ou incivilisés) qui ne reconnaissent pas la forme de gouvernement prescrite par les livres sacrés. Nous ajouterons en terminant que diverses espèces d’interdiction atteignent les eaux de quatre rivières dans l’Hindoustan. Il est défendu de toucher les eaux de la Caramnassa, qui sépare la province de Bahar de celle de Benares ; de se baigner dans la Caratoya, petite rivière du Bengale ; de nager dans le Gondak, l’un des affluens orientaux du Gange, et enfin de traverser l’Attock.

De Nilâb à Karabâgh (improprement appelé Calabâg), vers le 33° L. N., l’Indus serpente au travers des montagnes ; à sa sortie de la chaîne des monts salins (salt range), il s’étend en une nappe claire, profonde et tranquille, et poursuit son cours majestueux vers le sud ; c’est là que commence le cours moyen de l’Indus. Cependant, de ce point jusqu’à la mer, son bord occidental est longé par un grand système de montagnes (la chaîne des monts Soliman), qui se lie au nord à l’Hindou-Koush, et finit sur la côte de la mer Indo-Persique au cap Mouari ou Monze (le Fines Gedrosiœ des anciens) ;