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REVUE LITTÉRAIRE DE LA GRANDE-BRETAGNE.

beaucoup de livres français, vous trouvez chez James Howitt la passion dans l’harmonie. Il aime, rêve, pense, pleure, s’attendrit ; dans tout ce qu’il écrit, une émotion continue et contenue se fait sentir, et cette énergie ne reste jamais à l’état d’ébauche : cette flamme est ardente, quoique limpide ; l’exécution est délicate, mais non brutale ; la pureté de la forme, qualité secondaire quand la pensée est faible, devient merveilleuse et fait ressortir les qualités intérieures et profondes de l’homme et de l’écrivain. Malheureusement, ou heureusement, Howitt, se conformant aux traditions de sa secte, n’aborde point les grandes questions historiques et philosophiques, et ne publie que des livres d’éducation.

Une très mauvaise Histoire anecdotique des Reines d’Angleterre, compilation indigeste ; un assez bon voyage, up the Rhine (en remontant le Rhin), et des Oriental Outlines, par W. Wright, qui n’offrent rien de saillant, ne se trouvent ici que pour mémoire. L’Écossais Tytler, érudit et écrivain distingué, a placé quelques matériaux nouveaux et intéressans dans son livre intitulé l’Angleterre sous Édouard VI et Marie Tudor. Cependant l’érudition véritable trouvera un aliment plus curieux et plus neuf dans le Mabinogion, recueil de contes traduit de la langue gallique (welsh), par miss Charlotte Guest. Cet ouvrage, que l’on aurait peine à croire sorti de la plume d’une jeune personne, si la chose n’était incontestable, n’est pas exécuté avec toute la fidélité désirable en pareille matière ; mais le petit nombre de monumens que possède la littérature celtique et leur extrême obscurité prêtent de l’intérêt à la traduction de miss Guest. Citons enfin la suite des Aventures du comédien Mathews, livre médiocrement écrit, mais assez plaisant pour tenter quelque manipulateur hardi, qui l’attribuera sans doute à Talma, Kean, Iffland, selon la volonté ou le caprice du libraire.

Les Annuaires et les livres d’images n’ont pas manqué cette année. La pauvreté de l’intelligence s’arrange fort bien de cette manie pour les gravures, de cette séduction adressée aux yeux, de ce luxe enfantin auquel notre époque attache tant de prix. On aime la blancheur du papier, la rondeur du type, la disposition des marges, la nouveauté et l’élégance de la reliure. On se fait une poésie de ces misères, et l’on charge de volumes qui étincellent, mais qui ne contiennent et ne disent rien, les tables de palissandre. Lorsque cette fureur d’illustration a épuisé ses ressources anglaises, françaises, italiennes, elle va chercher au bout du monde quelque localité inconnue qu’elle exploite à loisir. L’Irlande, l’Amérique, l’Espagne, l’Austra-