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remarquables strophes dans ses recueils pour défrayer plus d’une réputation de grand poète, et dans sa prose, quoique plus mêlée encore, il demeurera assez de pages éloquentes. M. Lemercier aussi a laissé de quoi suffire à une belle gloire. S’il n’avait écrit qu’Agamemnon, Pinto (ajouterai-je les Quatre Métamorphoses), peut-être serait-il demeuré au premier plan ?

Quoi qu’il en soit, les autres essais de M. Lemercier ont aussi leur prix ; ces hauts instincts, ces soulèvemens d’un talent grandiose et bientôt intercepté, ces contradictions qui sont celles du temps même, ce laborieux enfantement qui a peu produit d’œuvres égales à ses efforts, tant de génie presque, de caractère et de vertu supérieurs à ce qui en est sorti, tout nous engageait à rappeler l’attention sur ce vétéran de nos modernes poètes, injuste peut-être parfois pour ceux qui le suivent et qui lui ressemblent trop. Qu’il veuille ne voir, dans nos libertés d’examen à son égard, qu’un hommage de respect pour une nature poétique et morale si digne du regard, et qui décèle d’autant plus de traces de hauteur native qu’on la considère plus en elle-même. Heureux ceux chez qui l’homme vaut mieux encore que l’écrivain.


Ch. Labitte.