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lenbourg. Un prince slave, Zwentibold, reçut comme fief, de l’empereur Arnould, le duché de Bohême : c’est la première relation féodale de ce pays avec l’empire. Pendant le désordre anarchique qui signala le commencement du Xe siècle, un dangereux ennemi vint d’Orient pour en profiter et l’accroître encore ; ce furent les Madjiars, qui, poussés en avant par les Petchénègues, s’emparèrent de la Hongrie et dévastèrent l’Allemagne, qu’ils soumirent à un tribut. Celle-ci n’eût pas résisté sans doute à la double attaque des Hongrois et des Slaves, si la couronne tombée du front dégénéré des descendans de Charlemagne n’eût été relevée par les princes de la maison de Saxe. Henri-l’Oiseleur battit les Slaves, conquit le Brandebourg, et força le duc de Bohême à l’hommage. Encouragé par ces premiers succès, il osa refuser le tribut aux Hongrois, sur lesquels il remporta, près de Mersebourg, une éclatante victoire. Son fils, Othon-le-Grand, aussi habile et aussi vaillant que lui, repoussa une nouvelle invasion de ce peuple redouté, dont il tailla les hordes en pièces sur les bords du Lech. Ce fut la dernière grande attaque venant de ce côté. Au XIe siècle, les Hongrois, devenus sédentaires, s’adoucirent et se civilisèrent sous l’influence du christianisme. Ils eurent pour apôtre et pour législateur leur roi saint Étienne, auquel le pape Silvestre II donna le titre de roi apostolique. C’est vers la même époque que la lumière de l’Évangile se répandit parmi les peuples slaves et scandinaves, grace aux hardis missionnaires qui allèrent fertiliser de leur sang ces contrées sauvages. Ainsi tous les peuples européens entraient successivement dans la grande république chrétienne, et les limites de la barbarie reculaient avec celles du paganisme.

Du XIe au XIVe siècle, on voit l’empire allemand et la race allemande gagner lentement, mais continuellement, vers l’est et le nord-est. Conrad II soumet les Slaves entre l’Elbe et l’Oder. Henri III, son successeur, vainqueur des Hongrois, étend la marche d’Autriche jusqu’au Kahlenberg et à la rivière de Leitha. Sous Henri V, Albert-l’Ours recule les frontières de la marche de Brandebourg et en peuple une partie avec des laboureurs qu’il fait venir de Flandre. Plus tard Henri-le-Lion, duc de Saxe, étend ses conquêtes dans le Mecklenbourg et le Holstein, et établit dans ces provinces une masse de paysans flamands et allemands. Frédéric Barberousse réunit à l’empire la Poméranie, jusque-là indépendante. À la fin du XIIe siècle, l’ordre des Porte-Glaives, fondé pour défendre les missionnaires chrétiens contre les païens de la Baltique, s’empare de la Livonie, de l’Esthonie et de la Courlande. Le siècle suivant, les chevaliers teutoniques