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Mélancthon avait rencontré chevauchant sur la route d’Heidelberg. Cinq ans avaient mûri ce jeune homme et en avaient fait un des chefs les plus décidés de la réforme. C’était, comme le remarque Bossuet, le plus capable aussi bien que le plus vaillant des princes protestans. Prévoyant que toutes ces discussions finiraient par la guerre, et nourrissant des pensées d’indépendance et d’agrandissement, il avait senti le besoin d’assurer l’union politique dans le parti par l’union de doctrines, et c’est dans ce but qu’il avait réuni à Marpurg les principaux théologiens de la réforme. Luther, Mélancthon et Osiandre y représentaient l’église saxonne ; Œcolampade et Zwingle, les sacramentaires et l’église de Suisse ; Bucer, celle de Strasbourg, qui inclinait vers les sacramentaires, outre un certain nombre d’adhérens attachés à ces divers chefs, et qui ne s’étaient pas encore fait de nom dans le nouvel évangile.

Malgré le grand intérêt du landgrave et celui de tout le parti à se mettre d’accord, et encore qu’on eût coulé sur tous les autres points, moins par facilité que pour ne pas soulever des difficultés prématurées, on demeura plus séparé que jamais sur la question d’où était née la secte des sacramentaires, la présence réelle. Après un débat de trois jours, où figurèrent seuls Luther et Zwingle, en présence des autres qui y jouèrent le rôle de personnages muets, on se quitta en promettant qu’on n’écrirait plus les uns contre les autres. Il faut croire qu’on n’entendit pas par là les récits qui pouvaient être faits par lettres des divers incidens de la conférence, car il s’en répandit plusieurs où l’on ne s’était pas ménagé.


Nisard.
(La suite au prochain no.)