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Le recueil de ses comédies écrites, à l’imitation de Térence (in œmulationem Terentii), suivant la teneur un peu ambitieuse du titre, se compose de six, ou plutôt, comme je le soupçonne, de sept pièces. Je crois, en effet, que c’est par une mauvaise division, introduite par Celtes, que la première comédie du recueil, Gallicanus, est aujourd’hui coupée en deux actes. Je suis tenté de croire que la légende de Gallicanus[1] et celle de Jean et Paul[2], qui se trouvent séparées dans les Bollandistes, ont fourni à Hrosvita le sujet de deux comédies distinctes, et qui se suivent, à peu près comme dans Shakspeare les diverses parties de Richard II et de Henri IV[3].

Dans la première partie de cette pièce, Constantin-le-Grand, impatient de soumettre les Scythes, charge de cette mission difficile le plus habile de ses lieutenans, Gallicanus[4], encore païen. Avant de partir, Gallicanus demande à l’empereur de lui accorder, s’il réussit dans cette campagne, la main de sa fille Constantia, dont il est amoureux. L’embarras de l’empereur est très grand, car non-seulement sa fille est chrétienne, mais elle a fait secrètement vœu de virginité. Constantia conseille à son père de ne donner qu’un vague espoir à Gallicanus, et cependant elle le fait prier d’emmener avec lui, pendant cette guerre, Paul et Jean, ses primiciers : elle prendra, de son côté, auprès d’elle, Artémia et Attica, les deux filles de Gallicanus. Celui-ci, satisfait de ces arrangemens, offre un sacrifice aux dieux, et se met en marche. Dans une première rencontre, les Scythes guidés par leur roi, Bradan, ont l’avantage sur les Romains ; les tribuns eux-mêmes lâchent pied. Dans cette extrémité, Gallicanus, par le conseil de Paul et Jean, invoque le Christ, et aussitôt il voit apparaître un ange, qui rend le courage à ses troupes et ôte la force aux ennemis. Les Scythes mettent bas les armes, et se reconnaissent tributaires de Constantin. À son retour, Gallicanus, converti au

  1. Bolland., Acta sanct., 25 jun., tom. V, pag. 35, seqq.
  2. Ibid., 26 jun., tom. V, pag. 158, seqq.
  3. Ce qui me confirme dans cette opinion, qui est aussi celle de Gottsched (Nothiger Vorrath, etc., tom. II, pag. 19), c’est : 1o que Gallicanus est le seul drame de Hrosvita qui soit ainsi coupé ; 2o qu’il y a devant la seconde partie une nouvelle liste de personnages ; 3o que la première partie se termine par la formule finale amen, qui, dans les drames religieux du moyen-âge, correspond au plaudite des comédies païennes.
  4. Leuckfeld, dans la liste qu’il donne (Antiq. Gandersh., cap. XXIV, pag. 274) des comédies de Hrosvita, traduit le titre de Conversio Gallicani principis par Histoire de la conversion d’un prince français !. Le même auteur à la liste des neuf poèmes de Hrosvita en ajoute un dixième, qu’il intitule De la Chasteté des nonnes. Le titre et l’ouvrage sont purement imaginaires. Leuckfeld a pris un éloge adressé en général aux poésies de Hrosvita pour le titre d’un ouvrage particulier.