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MÉLANCTHON.

On en délibérait avec mystère dans des réunions où n’était admis aucun de ses amis. Pour lui, il avait préparé sa défense pour toutes sortes d’attaques, s’étendant sur le grief principal, sur sa modération, laquelle rendait tout suspect. Il devait expliquer pourquoi il avait exposé certains dogmes dans la langue de tout le monde, coulé sur certains autres ; pourquoi, dans les diètes, ses avis avaient été modérés. Il devait dénoncer cette conspiration d’ignorans qui le haïssaient pour sa philosophie, comme il appelle ses études et ses goûts littéraires. Il se réjouissait d’avoir à plaider une si belle cause, aimant mieux un débat public que des soupçons dans les ténèbres.

Cette attitude fit tomber l’affaire. Je trouve, à l’année suivante, 1538, une lettre de Mélancthon à ce même Jacques Schenk, où celui-ci est qualifié de prédicateur de la cour. C’était sans doute le prix de ses attaques contre Mélancthon. Dans cette lettre, Mélancthon s’excuse de ce qu’un livre de Schenk n’est pas encore imprimé. « L’imprimeur attestera, dit-il, qu’ayant reçu le livre avec ordre de l’imprimer, je l’ai porté à Luther, qui ne l’a pas encore lu, quoique je l’en aie pressé. » Il prie Schenk de ne pas mal penser de lui, puisqu’il a fait son devoir, et il ajoute : « Ne crois pas que je me plaise aux haines. »

X. — MÉLANCTHON RECTEUR DE L’ACADÉMIE DE WITTEMBERG.

Cette année (1538), il fut élu recteur de l’académie de Wittemberg. Les monumens qui nous restent de son rectorat se réduisent à quelques avis aux étudians. Ces avis ne sont pas sans intérêt pour l’histoire des mœurs.

J’en trouve un daté du 2 mai, qui prescrit aux étudians d’assister à la lecture publique des statuts et des règlemens de l’académie, en présence des maîtres et docteurs. L’avis du recteur laisse percer quelques plaintes contre la conduite relâchée des étudians. Cette lecture des statuts se faisait dans toutes les circonstances de quelque solennité, soit à la reprise des cours, soit lors de l’installation du nouveau recteur, soit à la distribution des grades académiques. Comme les règlemens étaient mêlés de conseils, l’académie tenait la main à ce que tous les étudians en entendissent la lecture. C’était un premier hommage à la discipline.

Un autre avis, daté du 8 juin, invite les étudians et les maîtres à venir, selon l’usage, déposer à l’autel les légers dons qui doivent être offerts aux ministres de l’Évangile. C’était une des ressources du clergé