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cessé en Suisse, par la mort de Zwingle, frappé sur le champ de bataille, et l’église suisse se dissolvait pour être recueillie plus tard et réorganisée par Calvin.

Cette année-là, mourut l’électeur de Saxe, Jean, prince pacifique, qui avait inspiré ou soutenu la plupart des démarches de Mélancthon à la diète d’Augsbourg. Cette mort et les incertitudes d’un nouveau règne ne changèrent pas les résolutions de Charles-Quint. Il avait promis, dans le traité de Nuremberg, d’obtenir du pape la convocation d’un concile, et il s’y employait avec activité. Le pape Clément n’accorda qu’à demi ce qu’il ne pouvait pas refuser, et des légats furent envoyés en Allemagne, en apparence pour témoigner de sa bonne volonté, en réalité pour éprouver les protestans sur les conditions qu’il songeait à mettre au concile. Ces conditions étaient que l’assemblée serait présidée par lui, et que les protestans s’engageraient d’avance à se soumettre au jugement qui serait rendu. Tous les théologiens saxons, à l’exception de Mélancthon, déclarèrent qu’il ne devait être souscrit ni à l’une ni à l’autre des deux conditions. Mélancthon se réunissait à eux pour repousser la seconde, qui n’était qu’un piége grossier ; mais il insistait pour qu’on acceptât la première, et il ne parut pas voir que le pape n’y tenait tant que parce qu’elle le rendait arbitre du jugement à intervenir.

Au reste, le concile n’eut pas lieu, le pape n’en voulant pas sans les conditions proposées, et l’empereur n’étant pas d’humeur ni peut-être en mesure de l’obtenir de force. Cependant ni la promesse n’en fut retirée par le pape, ni les démarches ne cessèrent du côté de l’empereur. Cet état de choses dura jusqu’à la mort de Clément, arrivée en 1534, au milieu de ruses et d’efforts incroyables pour éluder le concile.

Il y eut quelque intervalle où Mélancthon reprit ses travaux littéraires, mais avec des interruptions continuelles et toutes sortes de dégoûts. Les affaires religieuses détournaient tout le monde de l’étude des lettres. On montrait si peu d’empressement pour les cours de belles lettres, quelle que fût la nouveauté des matières, presque toutes inconnues, que le professeur le plus populaire de l’Allemagne était souvent réduit, faute d’auditeur, à changer d’un mois à l’autre le programme de ses leçons.

« J’avais espéré, dit-il dans un avertissement affiché aux portes de l’académie, que la douceur de la seconde olynthienne inviterait un grand nombre d’auditeurs à connaître Démosthènes ; car que peut-on imaginer de plus doux et de plus solide que cette harangue ? Mais,