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national et le patriotisme des citoyens, le duc d’Angoulême et ses amis sur l’influence d’une armée étrangère. Les malheurs du temps et le peu de souci que le gouvernement impérial avait montré du peuple, expliquent cette disposition des ames, mais ne la justifient pas.

« Soldats, disait le maréchal Soult dans une proclamation, le général qui commande l’armée contre laquelle nous nous battons tous les jours, a eu l’impudeur de vous provoquer et de provoquer vos compatriotes à la révolte et à la sédition. Il parle de paix, et les brandons de la discorde sont à sa suite ; il parle de paix, et il excite les Français à la guerre civile. Graces lui soient rendues de nous avoir fait connaître lui-même ses projets ! Dès ce moment, nos forces sont centuplées, et, dès ce moment aussi, il rallie lui-même aux armes impériales ceux qui, séduits par de trompeuses apparences, avaient pu croire qu’il faisait la guerre avec loyauté. Aux armes ! Que dans tout le midi ce cri retentisse !… »

Toutes les apparences étaient en effet contre le duc de Wellington ; mais voyons maintenant, par ses propres lettres, quels étaient ses rapports avec le parti royaliste et le duc d’Angoulême.

Le duc d’Angoulême était si mécontent du rôle qu’il jouait au quartier-général anglais, qu’il se disposait à retourner en Angleterre, quand le marquis de La Rochejaquelein vint le trouver à Saint-Jean-de-Luz, au nom d’un comité royaliste qui s’était formé à Bordeaux, et se composait de quelques gentilshommes du Médoc, réunis par les soins de la marquise de Donissan. Il s’agissait d’appeler les troupes anglaises à Bordeaux, et d’opérer, de concert avec elles, un mouvement en faveur des Bourbons.

Le 4 mars, lord Wellington écrivit au comte de Liverpool : « Le duc d’Angoulême reste toujours incognito, et vit retiré. Il a prévenu hier M. de Vielcastel qu’il ne ferait rien sans mes avis. Je n’ai pas jugé à propos de le prier de m’accompagner dans nos dernières opérations, et je ne l’ai pas vu depuis le 20 du mois dernier ; mais je crois qu’il arrivera ici aujourd’hui. »

Le duc d’Angoulême vint, en effet, au quartier-général de Saint-Séver, et lord Wellington, sans admettre les propositions de M. de La Rochejaquelein, consentit à diriger sur Bordeaux le maréchal Beresford avec 15,000 hommes de troupes anglaises. Les instructions du maréchal Beresford sont du 7 mars. Il a ordre, à son arrivée à Langon, de faire des reconnaissances le long de la Garonne et du côté d’Agen. L’objet de sa mission est d’occuper Bordeaux, d’y établir l’autorité anglaise, et de s’emparer, s’il se peut, de la navigation de