Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 19.djvu/764

Cette page a été validée par deux contributeurs.
744
REVUE DES DEUX MONDES.

attention et de faire la recherche des sacs, etc., de leurs soldats, et de leur ôter tout ce qui n’y devrait pas être, comme de faire l’appel des compagnies à chaque heure du jour et de la nuit. Je suis bien fâché d’être obligé de prendre des mesures plus sévères, mais il faut arrêter les désordres, coûte que coûte. Je suis vraiment peiné sur ce sujet. Je fais tout en mon pouvoir pour l’armée espagnole, et je ne peux pas faire conduire ses soldats comme les autres. »

Les efforts que faisait lord Wellington pour mettre l’ordre dans la guerre et maintenir les lois de la discipline, avaient presque toujours des résultats satisfaisans, et, en Espagne, il lui était arrivé souvent, sur des plaintes suffisamment spécifiées, de découvrir les coupables au milieu d’une division, et de les faire punir, après leur avoir fait restituer leur butin ; cette tâche n’était cependant pas facile. Aussi écrivait-il au général Giron : « Je commande les plus grands coquins de toutes les nations du monde, et il faut une main de fer pour les tenir en ordre, et toute espèce d’informations pour les découvrir. »

Il est vraiment intéressant de suivre, dans les dépêches du duc de Wellington, les dispositions qu’il prenait en entrant en France, et qui sont toutes la conséquence des principes émis dans les lettres que j’ai déjà citées. Ayant rencontré, au moment de passer la frontière, quelques soldats qui revenaient d’Olagne ivres et chargés de butin, il se hâte d’écrire au lieutenant-général sir John Hope, qui commandait cette division, que, fût-on quatre fois plus nombreux, on n’aurait aucune chance de pénétrer en France, si on ne pouvait empêcher les soldats de piller, et en même temps il adresse d’Irurita, à l’armée, un ordre du jour où il lui expose, 1o  qu’il doit appeler son attention sur la différence qu’il y avait entre ses rapports avec les peuples d’Espagne et de Portugal et ceux qu’elle aura avec la population à laquelle elle va avoir affaire aux frontières de la France ; 2o  que les généraux et officiers doivent s’appliquer à entretenir des communications régulières et constantes avec les corps sous leurs ordres, et à empêcher les soldats de s’écarter de leurs camps et cantonnemens ; 3o  qu’il entend par-dessus tout que les habitans soient bien traités, et qu’on ne porte pas atteinte à leurs propriétés particulières ; 4o  que l’armée ne doit pas oublier que les nations alliées sont en guerre avec la France, uniquement parce que le chef de la nation française ne veut pas accorder la paix et veut les soumettre à son joug, et que les maux soufferts par l’Espagne et le Portugal dans l’invasion de ces deux pays ont été causés par l’indiscipline des soldats, par leurs cruautés encouragées et autorisées par leurs chefs. Or, se venger de ces