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REVUE. — CHRONIQUE.

presse. La seule convocation d’un congrès annoncerait une sorte d’accord préalable entre les puissances, un ensemble de principes qui serait partagé par toutes ; mais, malheureusement, les choses n’en sont pas là, et la presse attaque un fantôme, car la proposition d’un congrès n’a été faite ou du moins n’a été acceptée par personne.

Il y a à Vienne, comme dans toutes les capitales de l’Europe, cinq représentans de cinq grandes puissances, et de plus un homme d’état d’un esprit sage et d’un immense talent, qui est le prince de Metternich. C’est de là qu’est venue la pensée de suspendre les arrangemens du sultan avec le pacha, et de les soumettre à l’approbation des puissances. La communication de ce projet a été faite, selon les voies ordinaires, aux ambassadeurs étrangers à Vienne, qui l’ont reçue ad referendum, et leurs cabinets ayant approuvé cette pensée, il était naturel que le projet de M. de Metternich, devenu une résolution des cinq puissances, fût communiqué directement de Vienne à Constantinople. Il est seulement malheureux pour nous qu’au reçu de la dépêche de Vienne, l’ambassadeur d’Autriche à Constantinople n’ait pas été dans la situation de répondre à son cabinet que, grace aux bons offices de la France, tous les arrangemens étaient déjà terminés entre le sultan et son vassal.

Dans tout ceci, il n’a pas été question de congrès, ni même de ce qu’on appelle une conférence, les ambassadeurs des puissances n’ayant ni demandé ni reçu des pouvoirs ad hoc pour traiter séparément des affaires d’Orient, comme cela a eu lieu à Londres, quand il a été question de traiter des affaires de la Belgique. Qu’on se rassure donc, il n’y aura pas de protocoles, et l’on traitera des affaires de l’Orient à Paris, à Vienne, à Londres, à Saint-Pétersbourg, à Berlin, et même un peu à Constantinople, à la fois. La Russie avait déclaré, dès long-temps, que sa position de vicinité ne lui permettait pas de laisser soumettre, pour son compte, à un congrès la nature ou la fixation de ses rapports avec l’empire turc. C’eût donc été un grand pas vers un accord général, et déjà une concession, que l’entrée de la Russie dans un congrès. La Russie serait loin d’en être là, s’il était vrai qu’elle eût présenté une note où elle annoncerait vouloir se maintenir dans les termes du traité d’Unkiar-Skelessi, qui lui fait une position particulière. Toutefois, il paraît certain que, sur quelques points principaux, l’accord règne entre les cinq puissances, et qu’on peut prévoir le moment où une sorte de pacification aura lieu pour l’Orient.

Nous ne nous arrêterons pas à des puérilités. Après la communication de la dépêche de M. de Metternich, un aide-de-camp de M. l’amiral Roussin est parti pour Alexandrie, chargé de remettre au pacha une note qui lui faisait connaître la décision des cinq puissances. Cet officier était-il également chargé de notifier au vice-roi d’Égypte qu’il eût à remettre à la Porte la flotte du capitan-pacha, ce gage qu’il serait injuste de retenir désormais, puisque ce n’est plus avec la Porte, mais avec les cinq puissances que le pacha doit s’entendre ? Ce fait, annoncé par une dépêche télégraphique, a excité de grandes clameurs, et il a été nié le lendemain par le gouvernement. Si l’amiral Roussin s’est chargé de transmettre cette demande au pacha, ç’a été sans doute