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LE SCHAH-NAMEH.

Le premier exploit de Rustem est de tuer d’un coup de massue un éléphant furieux ; puis il va accomplir une aventure assez semblable à celles des romans de chevalerie. Il s’agit de pénétrer dans un château-fort placé au sommet d’une haute montagne. Rustem se déguise en marchand de sel, cache ses compagnons parmi les charges que portent les chameaux, et pénètre ainsi dans la place au moyen d’un stratagème bien des fois employé, ou du moins prêté bien des fois à différens personnages par les historiens de l’antiquité et du moyen-âge.

Firdousi reprend ensuite l’histoire des rois de l’Iran, en racontant la mort de Minoutcheher, qui, sur son lit de mort, adresse à son fils Nouder un discours où se trouve cette phrase mélancolique : « J’ai fondé beaucoup de villes et beaucoup de forteresses, et maintenant je suis dans un tel état, que tu dirais que je n’ai pas vécu, et le nombre des années passées est effacé de mon souvenir. Quand un arbre ne porte que des feuilles et des fruits amers, sa mort vaut mieux que sa vie. »

Nouder, le nouveau roi, mécontenta les grands et le peuple « les paysans formèrent des armées, dit Firdousi, et les braves demandèrent pour eux-mêmes le pouvoir. » Dans sa détresse, Nouder appelle Sam à son secours. D’autre part, les grands, s’adressant au vieux guerrier, lui disent : « Si Sam le brave voulait s’asseoir sur le trône, quel mal y aurait-il ? » Mais Sam repousse les offres des grands vassaux. L’esprit d’insurrection qui se manifestait quelquefois parmi le bas peuple et les chefs militaires contre le souverain, et le dévouement religieux pour le sang de Feridoun qui protégeait sa famille, sont vivement empreints et contrastent énergiquement dans ce curieux passage.

D’autres dangers menacent le roi. Pescheng, chef des Touraniens, et son fils Afrasiab, se préparent à venger Selm et Tour ; en d’autres termes, les nations tartares ou scythiques s’apprêtent à fondre sur la Perse.

Dans cette guerre, le roi d’Iran est fait prisonnier, puis mis à mort par Afrasiab. Celui-ci pose sur sa tête la couronne de Djemschid, et prend la place du roi dans le pays d’Iran. La tradition ne pouvait exprimer plus clairement le fait d’une conquête de la Perse par les populations du nord, comme elle en a subi un si grand nombre depuis les temps héroïques d’Afrasiab jusqu’aux temps les plus récens.

Cette guerre ramène Rustem sur la scène. Firdousi raconte d’abord