Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 19.djvu/447

Cette page a été validée par deux contributeurs.
443
LE SCHAH-NAMEH.

plutôt qu’on ne monte de la terre au ciel, on est plus enclin à l’anthropomorphisme qu’à l’apothéose.

Siamek, fils de Kaioumors, et Houscheng, son petit-fils, combattent les divs, c’est le nom des mauvaises puissances. La lutte du bon et du mauvais principe, qui est le fond de la théologie de Zoroastre, est l’ame du poème de Firdousi. La tradition dont il est l’organe identifie sans cesse les rois de l’Iran avec le principe de lumière et de pureté, les Touraniens leurs ennemis avec le principe de corruption et de ténèbres.

On suit pas à pas les progrès de la civilisation naissante. Houscheng découvrit l’art d’extraire et de forger le fer. Comme l’empereur Yao à la Chine, il prend soin de faire écouler les eaux. On savait déjà semer, planter et moissonner, on connaissait la propriété, on possédait l’art de faire le pain ; mais, selon la tradition, on n’avait cependant encore que des feuilles pour se couvrir.

La découverte du feu amène l’établissement de son culte, qui remonte ainsi à l’origine de la société persane. L’art de faire des habits avec les peaux et les fourrures des animaux est attribué également à Houscheng. Sous son fils Tahmouras, on apprend à tondre la laine sur le dos des brebis et à la filer, à dompter, à apprivoiser les bêtes sauvages, à dresser le faucon pour la chasse ; mais celui des premiers rois de la Perse dont le nom résume, pour ainsi dire, toute cette antique civilisation, c’est Djemschid. Non-seulement Djemschid perfectionne l’art de fabriquer les armes et de tisser les vêtemens, mais il organise la société, il fonde les castes. Les anciennes castes de la Perse correspondent aux quatre castes de l’Inde ; la première est celle des prêtres, la seconde est celle des guerriers, la troisième renferme les agriculteurs, la quatrième les artisans et les marchands. Djemschid est le consommateur du perfectionnement social dont il représente une période assez avancée. Il découvre les métaux précieux, les pierreries, les parfums ; il invente l’art de guérir les maladies ; il représente aussi la science ; il est le grand investigateur, il monte sur un vaisseau rapide ; durant cinquante années, il parcourt toute la terre, et nulle qualité des êtres ne reste cachée devant son esprit.

Le monde était soumis à Djemschid ; Dieu protégeait sa puissance et sa gloire. Parvenu au comble des grandeurs et de la prospérité, il fut atteint par l’orgueil, et il ne vit plus dans le monde que lui-même « il se délia de Dieu et ne l’adora plus, il s’écria : « C’est moi qui ai fait naître l’intelligence dans l’univers, et la terre n’est devenue ce