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REVUE DES DEUX MONDES.

MARC, buvant.

Ce vin est détestable, et je crains qu’il ne me porte à la tête.

(Long silence.)
PREMIER SPADASSIN.

Le vieux s’endort.

DEUXIÈME SPADASSIN.

Il n’est pas ivre.

TROISIÈME SPADASSIN.

Mais il a une bonne dose d’hivers dans le ventre. Va voir un peu si Mezzani n’est pas par là dans la rue ; c’est son heure. Ce jeune gars qui ouvre là-bas de si grands yeux a un surtout de velours noir qui n’annonce pas des poches percées. (Le deuxième spadassin va à la porte.)

L’HÔTE, à Astolphe.

Eh bien ! seigneur Astolphe, quel vin aurai-je l’honneur de vous servir ?

ASTOLPHE.

Va-t’en à tous les diables !

TROISIÈME SPADASSIN, à l’hôte à demi-voix, sans qu’Astolphe le remarque.

Ce seigneur vous a demandé trois fois du malvoisie.

L’HÔTE.

En vérité ?

(Il sort en courant. Le premier spadassin fait un signe au troisième, qui met un banc en travers de la porte comme par hasard. Le deuxième rentre avec un cinquième compagnon.)

LE PREMIER SPADASSIN.

Mezzani ?

MEZZANI, bas.

C’est entendu. D’une pierre deux coups… Le moment est bon. La ronde vient de passer. J’entame la querelle. (Haut.) Quel est donc le mal appris qui se permet de bâiller de la sorte ?

ASTOLPHE.

Il n’y a de mal appris ici que vous, mon maître. (Il recommence à bâiller, en étendant les bras avec affectation.)

MEZZANI.

Seigneur mal peigné, prenez garde à vos manières.

ASTOLPHE, s’étendant comme pour dormir.

Tais-toi, bravache, j’ai sommeil.

PREMIER SPADASSIN, lui lançant son verre.

Astolphe, à ta santé !