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colones étaient passées du fisc de Villemeux dans celui de Béconcelle, pour demeurer avec leurs maris, colons, à Villiers-le-Mahieux, et dans le même fisc, un colon de Gilly près de Nuits-sous-Beaune tenait un manse à Breuil, dans le diocèse de Chartres. Les mutations de cette espèce furent, comme nous l’avons dit, autorisées dans l’empire par le code de Justinien, pourvu qu’elles eussent lieu dans les biens du même propriétaire. Il paraît aussi que l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés établissait, dans les terres nouvellement acquises par elle, des colons aussi bien que des serfs, qu’elle déplaçait alors, puisqu’elle les tirait de ses autres domaines.

Mais le colon ne pouvait se soustraire lui-même à sa condition : quiconque avait été une fois engagé dans le colonat devait y rester attaché. Il n’y avait que deux moyens d’en sortir :

D’abord par la prescription. Lorsque le colon avait joui pendant trente ans, et la colone pendant vingt, de la liberté, sans être revendiqués par personne, ils restaient définitivement libres[1], si leur maître était un Romain ou un Lombard ; car si c’était un Franc ou un Allemand, la prescription n’avait pas lieu. Mais, d’après une loi de Louis-le-Débonnaire, celui qui se prétendait libre depuis trente ans, devait prouver qu’il était né d’un père ou d’une mère libre, ou justifier d’une charte d’affranchissement[2] ;

Ou par l’affranchissement. Le colon, comme le serf, était affranchi avant d’entrer dans les ordres. Il pouvait l’être également sans qu’il embrassât l’état ecclésiastique. Le maître disposait alors à son gré des serfs, du colon et du fonds colonaire[3].

La condition du colon était meilleure que celle du serf. D’après la loi salique, la composition pour le meurtre d’un Romain tributaire, la même, à ce qu’il me paraît, que pour le colon, était fixée à quarante-cinq sous, tandis que le meurtre d’un esclave se rachetait par trente-cinq sous de composition. D’après la loi des Allemands, le colon avait une composition égale à celle de l’Allemand lui-même. Néanmoins, lorsqu’un père ne laissait en mourant que deux filles,

  1. Capitul. adscriptum capitul. Wormat., an. 829, c. 3 ; dans Baluze, tom. I, col. 674. — Cette espèce de capitulaire, tiré du Code théodosien, a été aussi recueilli par Reginon, De Eccles. discipl., I, 22 ; et c’est une des raisons qui l’ont fait admettre par Baluze, et par M. Pertz.
  2. Carol. III, addit ad L. Longob., c. 8, dans Baluze, tom. I, pag. 348. — L. Longob. Lud. P., 58.
  3. Concil.  III, an. 538, c.  26. — Lud. P. capitul. Aquisgr., an. 817, c. 6, etc. — Testam. B. Remig., dans Bréq., pag. 31.