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stocratie aussi dévorante que la première. Ainsi ce n’est pas la naissance qui donne, comme autrefois, un titre à l’échafaud. Quiconque a acquis honorablement une fortune, ou a hérité d’un bien acquis par ses pères, est un aristocrate, et la mort l’attend. S’il restait quelque doute, l’article 13 les explique clairement ; le voici : « L’état social étant gangrené, pour passer à un état sain, il faut des remèdes héroïques ; le peuple aura besoin, pendant quelque temps, d’un pouvoir révolutionnaire. »

Des excès aussi inouis, même après notre terrible révolution, ont un côté rassurant. C’est que la société est menacée tout entière, c’est qu’on veut la détruire à fond, c’est que nul de ceux qui y possèdent quelque chose, à quelque titre que ce soit, n’a l’espoir d’avoir la vie sauve et d’échapper à la spoliation. Ce n’est donc pas le moment de se demander avec stupeur ce que sont ces hommes qui demandent du bien-être à l’oisiveté et aux complots, qui veulent obtenir par l’assassinat ce qu’ils peuvent se procurer par le travail et par l’intelligence dans une société comme la nôtre. La société entière a le couteau sur la gorge, elle ne doit songer qu’à se défendre. Nous le disons surtout aux légitimistes, qui liront avec fruit le rapport de M. Mérilhou, il n’y aura pas de privilége, et tous ceux qui n’auront pas mis la main à l’édifice pour le soutenir périront sous ses débris. M. de Dreux-Brézé parlait hier de l’attitude de ce parti, important, disait-il, par le nombre, par les lumières et la fortune. Les lumières du parti légitimiste l’aideront alors à sauver sa fortune, et il se demandera sans doute, avant que de continuer son œuvre de désorganisation, si sa foi va jusqu’à se sacrifier tout entier, corps et biens, à sa croyance politique. La publicité donnée aux actes et aux principes des associations républicaines sera, nous n’en doutons pas, d’un très bon effet en France. La société attaquée ainsi et avec cette rage s’unira plus étroitement, et contiendra une poignée de meurtriers aussi insensés que criminels ! La société s’organisera fortement, nous en sommes sûrs. Nous voudrions qu’il en fût de même du pouvoir. C’est là tout ce que nous demandons.


— Un des hauts fonctionnaires de la Suède, M. le comte de Biœrnstiernn, qui s’était déjà distingué comme écrivain par deux ouvrages remarquables sur la constitution et les finances de son pays, vient de publier un nouveau livre dont le prompt succès a déjà retenti jusqu’à nous. Ce livre a pour titre : le Royaume britannique dans l’Inde orientale. C’est un tableau rapide, mais complet de cet immense pouvoir que l’Angleterre a conquis dans l’Inde, de son origine, de ses progrès, de son état actuel, de ses moyens d’appui et de ses chances d’avenir. Le long séjour que M. de Biœrnstiernn a fait en Angleterre, et sa position élevée dans la diplomatie, l’ont aidé à se procurer, sur tous les points qu’il voulait traiter, les documens les plus nouveaux et les plus précis. Les Anglais eux-mêmes rendent justice à la rigoureuse exactitude de son récit et de ses chiffres. Les Allemands le traduisent. Nous espérons le voir aussi traduit en France. Ce livre est un de ceux dont tout homme d’étude aime a enrichir sa bibliothèque.


V. de Mars.