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LES VICTIMES DE BOILEAU.

Que le bruit resveillé vint de sa violence
Effrayer le repos, la paix et le silence,
Et que le roy des feux, d’un rayon vif et pur,
Eut refait le matin, d’or, de pourpre et d’azur, etc.

C’est encore

L’esmail tremblant et vert de deux faisceaux de joncs.

Une biche qui veut se désaltérer dans une source prochaine quitte un moment son jeune faon :

On la voit s’avancer à jambes suspendues,
Faire un pas, et puis deux, et soudain revenir,
Et de l’objet aimé gardant le souvenir,
Montrer en mesme temps, par ses timides gestes,
Le soupçon et l’effroi…

Le tonnerre

Roule de mur en mur, bondit de coin en coin,
Eslargit et restreint sa flâme tortueuse,
S’eslance coup sur coup d’une ire impétueuse,
Piroüette, mugit…

Un serpent

De son dos escaillé les plis diversifie,
Se glisse sur l’esmail des herbes et des fleurs,
Adjouste un nouveau lustre à leurs vives couleurs,
Revient sur soy, se cherche, en maint nœud s’entortille,
Darde sa langue double, et dans l’or dont il brille,
Entre-semé d’argent, de cinabre et d’azur,
Se mire, s’esjoüit de n’avoir rien d’impur,
Offre je ne sais quoi d’horrible et d’agréable.

Vers fort beau par parenthèse, et que Boileau n’a pas dédaigné d’imiter. Le passage de la mer Rouge, que le satirique a immortalisé par sa raillerie[1], abonde en détails charmans et stériles. Beaucoup de chaleur, de vivacité, d’invention, mais aussi de puérilité.

  1. Tel autrefois qu’on vit avec Faret
    Charbonner de ses vers les murs d’un cabaret,
    S’en va, mal à-propos, d’une voix insolente,
    Chanter du peuple hébreu la fuite triomphante,
    Et poursuivant Moïse au milieu des déserts,
    Court avec Pharaon se noyer dans les mers.