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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL

EN FRANCE

DEPUIS 1815 JUSQU’EN 1837,
PAR M. A. DUQUESNEL.

On ne nous aurait pas informé que l’auteur de ce livre vit en province, dans la retraite, sans contact avec les choses et les hommes, que nous eussions pu le deviner à la naïveté du titre et du contenu. Pour entreprendre de juger souverainement le travail intellectuel qui s’accomplit en France, il faut tout savoir ou tout ignorer, se trouver à l’apogée ou à l’entrée de la carrière, avoir la science d’un critique consommé, ou la candeur d’un écrivain tout neuf. Si M. Duquesnel eût pensé quelque temps à son livre avant de l’écrire, s’il eût quitté sa solitude pour explorer un peu la réalité, nous croyons qu’il eût renoncé au dessein de critiquer son siècle. Après avoir reconnu, et cet aveu n’eût rien coûté à sa modestie, que pour cette tâche il n’avait pas qualité, il eût vu que l’œuvre elle-même n’était, en ce moment, ni possible, ni utile, et qu’on ne saurait prendre à parti un siècle qui a fourni à peine le tiers de sa carrière, pour lui faire son procès et lui prononcer son arrêt. La bizarre idée de vouloir juger le travail intellectuel en France, depuis 1815 jusqu’en 1837 ! Pourquoi ces dates et pourquoi pas d’autres ? On ne peut ainsi scinder le développement moral d’un pays par tranches arbitraires, comme s’il s’agissait d’une statistique appliquée à des objets matériels. Un sage