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rituel et si simple qu’il prononça au milieu de vous, du savant et modeste comte Reinhard, qu’il avait depuis long-temps rencontré dans la carrière diplomatique et qui le précéda de bien peu dans la mort. Il mit du prix à finir dans le paisible sanctuaire de la science une existence remplie d’évènemens et agitée par les révolutions.

Quelque avancé que fût son âge, en voyant en lui tant de force, en lui retrouvant toujours tant d’esprit, on était loin de prévoir que sa fin serait si prochaine. Deux mois après cette mémorable séance, M. de Talleyrand sentit les atteintes soudaines du mal qui devait l’emporter en quelques jours. Soumis à de douloureuses opérations, en proie à de cruelles souffrances, il les supporta avec le calme courageux qui ne l’avait jamais abandonné. Pendant qu’au milieu de sa famille éplorée il luttait avec simplicité, sans attendrissement et sans faiblesse contre les douloureux progrès de la mort, il fut honoré d’une royale visite et d’augustes adieux. Peu de temps après, il rendit le dernier soupir à l’âge de quatre-vingt-quatre ans, dont plus de cinquante s’étaient passés dans les grandes affaires.

Avec lui disparut une intelligence forte, l’un des restes les plus brillans de l’ancien esprit français, la dernière grande renommée de la révolution. M. de Talleyrand devait quelque chose à son origine, mais encore plus à lui-même. Introduit de bonne heure dans la carrière des honneurs par le crédit de sa famille, il ne put s’y maintenir long-temps que par sa propre habileté ; car, dans notre époque d’extrême agitation et de vaste concurrence, ce n’était pas à l’aide des souvenirs et des ancêtres qu’on s’élevait, se soutenait, se relevait, après avoir été renversé. Dès sa jeunesse, l’ambition lui ayant été offerte comme perspective et laissée comme ressource, il s’habitua à subordonner la règle morale à l’utilité politique. Il se dirigea surtout d’après les calculs de son esprit. Il devint accommodant à l’égard des désirs dominans, facile envers les circonstances impérieuses. Il aima la force, non par le besoin qu’en a la faiblesse, mais par le goût qu’elle inspire à l’habileté qui sait la comprendre et s’en servir. Il s’associa aux divers pouvoirs, mais il ne s’attacha point à eux ; les servit, mais sans se dévouer. Il se retira avec la bonne fortune, qui n’est pas autre chose pour les gouvernemens que la bonne conduite. Se mettant alors à l’écart, son grand mérite fut de prévoir un peu plus tôt ce que tout le monde devait vouloir un peu plus tard, et d’agir avec résolution après avoir attendu avec patience. Comme il se possédait entièrement, et qu’il était sûr de se résoudre à propos, il aimait à perdre du temps pour mieux saisir les occasions, croyant