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surtout pour objet d’apprendre ce qu’il est aujourd’hui nécessaire de bien savoir pour bien agir.

Des écoles primaires, établies dans chaque canton, doivent apprendre à l’enfance tous les principes des choses qu’elle a besoin de connaître, sans qu’il lui soit utile de les approfondir. Des écoles secondaires, placées au chef-lieu du district, sont appelées à préparer la jeunesse, par des notions plus étendues, à tous les états qu’elle embrassera plus tard dans la société. Des écoles spéciales de département ont pour but, en enseignant le droit, la médecine, la théologie, l’art militaire, de former l’adolescence à certaines professions publiques qui réclament, pour être exercées, une instruction particulière. Enfin, un institut national, à la fois corps enseignant qui professe ce qui se sait de plus haut, corps académique qui perfectionne ce qui se sait le moins bien, a la grande mission de centraliser l’esprit de la nation, comme l’assemblée législative en centralise la volonté.

Dans ce système d’éducation nationale les études étaient bien définies, mais le professorat était faiblement organisé. D’un autre côté, quoique les principes moraux y fussent l’objet d’une forte sollicitude et d’un enseignement suivi, on cherchait trop leur certitude dans le raisonnement et leur sanction dans l’utilité. Les sentimens que l’esprit ni ne donne, ni ne démontre, y prenaient la forme d’idées ; la morale y reposait sur l’intérêt qui peut bien la servir, mais non la fonder ; l’honnêteté y était professée comme une science, et la vertu recommandée comme un calcul. Telle était, du reste, la disposition du temps, qui, entraîné par une confiance sans bornes dans les forces de l’intelligence humaine, n’admettait que ses conceptions et préférait ce qui se prouve à ce qui se sent.

Pendant cette période rénovatrice, M. de Talleyrand se livra aux travaux les plus étendus et les plus variés. Il proposa l’adoption de l’unité des poids et mesures, afin que le peuple qui se donnait les mêmes lois et qui introduisait l’uniformité dans l’état pût se servir d’une règle commune dans ses transactions privées. Il rechercha l’élément invariable de cette unité dans une division du degré terrestre ou dans la longueur du pendule simple à secondes par une latitude déterminée. C’était le principe de la révolution appliqué à l’évaluation matérielle des choses. Il s’éleva contre le maintien des loteries en exposant l’énorme inégalité de leurs chances comme jeu, et l’immoralité de leurs produits comme impôt. Il concourut à la déclaration des droits et il provoqua l’abolition des dîmes d’après le