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les jours à six heures en hiver, à cinq en été, et ne se couchait pas généralement avant minuit. Le soir était le temps de son travail.

Sa manière de travailler, à ce qu’il paraît, était celle-ci : pour les œuvres de polémique journalière, il écrivait rapidement, corrigeait, raturait, produisait avec une difficulté réelle ; quant aux ouvrages de longue haleine, jamais il ne les écrivait qu’après avoir beaucoup lu, beaucoup pris de notes, et long-temps réfléchi sur ses lectures et sur ses notes ; mais ce travail d’incubation et de maturation une fois achevé, il écrivait vite, sans grande correction ni rature.

Il avait du goût pour la littérature et une heureuse mémoire ; il se plaisait souvent à répéter des morceaux d’Horace, ainsi que des passages tout entiers de Sydenham, nous dit-on. Pourquoi donc alors le mépris que, dans ses ouvrages, il voue à Sydenham, ce grand homme qui a été appelé avec raison l’Hippocrate anglais ?

Quelque passionné et quelque acrimonieux qu’il fût dans sa polémique scientifique, quelque intolérant et impitoyable qu’il se montrât pour les idées médicales qui n’étaient pas les siennes, il paraît que, dans les relations habituelles de la vie, Broussais était d’une grande bienveillance et d’une gaieté intarissable. Il chantait souvent, et il avait dans la tête un répertoire de chansons, bien choisi, je ne sais, mais au moins fort nombreux : il portait là la verve qui faisait le fonds de son caractère ; du reste, insouciant des choses de la vie, et ne formant pas d’autre vœu que celui de pouvoir toujours travailler pour vivre.

Broussais a laissé trois héritiers de son nom : MM. Casimir et François Broussais, tous les deux occupant un poste honorable dans la médecine militaire ; et M. Émile Broussais, avocat, livré à des études mystiques encore peu connues, et qu’on dit singulières.

Les ouvrages sortis de la plume de Broussais sont nombreux[1] et

  1. Thèse sur la fièvre hectique (1805) ; — Histoire des phlegmasies chroniques (1808), réimprimée quatre fois ; — Examen de la doctrine médicale généralement adoptée, 1ère édition en 1816, 2e édition en 1821, sous le titre d’Examen des Systèmes de Nosologie, précédé de propositions renfermant la substance de la médecine physiologique, 3e édition en 4 vol. (1829-1834) ; — Traité de Physiologie appliquée à la Pathologie (1821), 2e édition en 1834 ; — De l’Irritation et de la Folie (1828) ; — Commentaires des propositions de Pathologie consignées dans l’Examen (1829), 2 vol. in-8o ; — Cours de Pathologie et de Thérapeutique générales, 5 vol. in-8o (1835) ; — Mémoires sur la Philosophie de la médecine et sur l’Influence des médecins physiologistes (1832) ; — Du Choléra-Morbus épidémique (1832) ; — De la Théorie médicale dite Pathologique, contre un ouvrage de M. Prus (1826) ; — Réponse aux critiques de l’ouvrage sur l’Irritation et la Folie (1829) ; — Mémoire sur l’association du physique et du moral, lu à l’Académie des sciences morales et politiques en 1834 ; — Cours de Phrénologie (1836).

    Outre ces ouvrages et ces mémoires, Broussais a écrit un grand nombre d’articles de clinique, de physiologie et de polémique médicale, dans les Annales de la Médecine physiologique, journal qu’il fonda en 1822, et qui cessa de paraître en 1831.