Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 18.djvu/322

Cette page a été validée par deux contributeurs.
318
REVUE DES DEUX MONDES.

des choses nuisibles que l’homme peut connaître, rechercher ou éviter : donc il y a une médecine. — Que des hommes orgueilleux ne veuillent croire en toute chose qu’à eux-mêmes, et nient tout ce qu’ils n’ont pas vu les premiers, c’est un phénomène qui en effet s’observe de nos jours, comme au temps des plus grandes folies humaines ; que des hommes incapables de voir ne veuillent jamais voir, et disent avec une sorte de satisfaction : « Nous déclarons qu’il n’y a à l’horizon médical aucun point lumineux ! » on ne saurait qu’y faire. Toujours est-il qu’il y a des choses utiles et des choses nuisibles ; que, s’il y en a aujourd’hui, il y en a eu de tous les temps ; que, si l’homme est capable de les connaître aujourd’hui, il a toujours été capable de les connaître. Toujours est-il qu’il ne peut pas être et qu’il n’est pas indifférent pour l’homme possédé d’une fièvre ardente de rester en repos dans un lit bien chaud, ou de se jeter dans un fleuve glacé ; ni pour l’homme qui a une épine dans le pied, que cette épine y reste ou qu’elle n’y reste pas ; et, s’il existe des circonstances qui facilitent la sortie de cette épine, et d’autres qui s’y opposent, il est impossible que l’ami qui regarde souffrir son ami, et qui désire le soulager, ne distingue pas ces deux ordres de circonstances. En outre, à mesure que les hommes observent depuis plus longtemps, ils doivent reconnaître un plus grand nombre de choses utiles et de choses nuisibles, et distinguer mieux celles qui le sont un peu et celles qui le sont beaucoup ; celles qui le sont certainement et incontestablement, bien qu’on ne s’y fût pas attendu tout d’abord, et celles qui le sont d’une manière douteuse, quoique tout d’abord aussi on eût pu instinctivement penser le contraire. En un mot, jamais on ne nous fera comprendre que nous ne puissions pas, que nous ne devions pas, en montant sur les épaules de nos ancêtres, découvrir un horizon plus étendu que le leur.

Ceci fait que la vraie médecine, celle qui s’applique utilement à l’homme, a dû exister dès l’origine, dès que l’homme a souffert et qu’il a observé ; ceci fait encore qu’elle a dû se perfectionner dans la marche des siècles.

On a fort ingénieusement comparé la médecine et l’astronomie dans leur origine, leur marche et leurs progrès ; on a vu que ces deux sciences devaient remonter à la plus haute antiquité, puisque toutes deux s’adressaient à des phénomènes faciles à observer, possibles à prévoir, et très utiles à connaître. Les mouvemens vitaux, comme les mouvemens célestes, ont en effet frappé les premiers hommes par leur enchaînement, leur harmonie, leurs retours pério-