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de vivacité. On ne peut disconvenir que la tête, bien que toute dans le clair, ne soit parfaitement modelée. Oui, elle semble sortir de la toile, et si bien que les épaules s’y enfoncent. En revanche la robe rose vient en avant, en raison de son éclat, en sorte que la jeune personne qui a posé pour M. Duval, semble tendre le cou et avancer le corps. Tout cela est une conséquence forcée du parti pris par l’auteur. Qu’il n’aime pas la couleur, cela tient à son organisation ; qu’il ne la cherche pas, il a peut-être raison, car ce serait sans doute un soin inutile ; mais on a peine à concevoir qu’il aille s’imposer exprès des combinaisons de difficultés que ni Raphaël, ni Léonard de Vinci, ni Holbein, n’ont jamais abordées. Je ne cite, à dessein, que des maîtres chéris sans doute de M. A. Duval, et je me garde de lui opposer l’exemple des Titien et des Vélasquez, autorités peut-être encore moins récusables en matière de portrait. Ces grands hommes comprenaient la portée de l’art, et savaient qu’il n’a pas trop de toutes ses ressources pour arriver à l’imitation de la nature.

En résumé, il y a un talent extraordinaire dans ce portrait de M. A. Duval, talent qui n’est égalé que par son audace. S’il eût pu réussir, quelle gloire, en dernière analyse, eût-il recueillie de tous ses efforts ? Celle d’avoir surmonté des difficultés inutiles et qu’il s’était créées lui-même. Lorsqu’on est aussi heureusement doué que l’est M. A. Duval, on devrait employer son talent à toute autre œuvre qu’à ces jeux bizarres que les grands artistes ont toujours dédaignés.


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