Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 18.djvu/184

Cette page a été validée par deux contributeurs.
180
REVUE DES DEUX MONDES.

méphistophélès.

Je gage que vous vous rappelez pourtant le dernier piano que j’ai procuré à monsieur votre père ?

hélène.

Hélas, oui ! monsieur. J’avais commencé à en jouer, lorsque, au bout de trois leçons, je tombai malade, et mon père le fit emporter de ma chambre et me retira mon maître de musique.

méphistophélès.

Il fit bien. La musique vous aurait tuée, délicate comme vous êtes. Mais veuillez écouter le motif de ma visite aujourd’hui. J’ai une affaire à vous proposer.

hélène.

À moi, monsieur ? Veuillez revenir quand maître Albertus aura fini sa leçon ; il est mon tuteur.

méphistophélès.

J’aime mieux en causer avec vous, car cela ne regarde que vous. Je veux vous acheter votre héritage.

hélène.

Vous plaisantez, monsieur ? Je n’ai pas d’héritage ; mon pauvre père est mort ruiné. Toutes ses dettes ont été payées, et moi, il ne m’est rien resté du tout.

méphistophélès.

C’est bien malheureux !

hélène.

Oh ! je vous assure que cela m’est fort égal.

méphistophélès.

Mais moi, je n’en puis dire autant ; j’ai été extrêmement frustré dans cette banqueroute.

hélène.

Il n’y a pas eu de banqueroute, monsieur ; mon père a laissé de quoi payer tout ce qu’il devait.

méphistophélès.

En ce cas, votre tuteur voudra bien me solder une petite créance de 5,000 zwanzigs, dont j’apporte la reconnaissance. Cette dette n’a pas été acquittée.

hélène.

Juste ciel ! Et comment faire ? Il ne me reste rien ! Donnez-moi du temps, monsieur, je travaillerai.