Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 18.djvu/181

Cette page a été validée par deux contributeurs.
177
LES SEPT CORDES DE LA LYRE.

monument de la science. Tous les hommes ont soif du beau ; il faut que leur ame boive à cette source de vie ou qu’elle périsse. Les organisations humaines diffèrent : les unes aspirent à l’idéal par l’esprit, d’autres par le cœur, d’autres par les sens. Si vous voulez que les organisations humaines se perfectionnent, et qu’arrivant à un équilibre magnifique, elles conçoivent également l’idéal par l’esprit, par le cœur et par les sens, n’éteignez aucune de ces facultés ; car n’espérez pas amener d’abord tous les hommes à la vérité par les mêmes moyens. À ceux chez qui la beauté idéale ne peut se manifester que par les sens, donnez, pour préservatif contre la débauche, la nudité sacrée de la Vénus de Milo. Voyez votre erreur à vous autres moralistes, qui vous détournez avec crainte de cette beauté matérielle comme d’un objet impudique et propre à troubler les sens. Si vous compreniez l’art, vous sauriez que le beau est chaste, car il est divin. L’imagination s’éloigne de la terre et remonte aux cieux en contemplant le produit d’une inspiration céleste ; car ce produit, c’est l’idéal.

albertus.

Mon fils, tes idées sur ce point me paraissent dignes d’être méditées. En effet, ceux qui s’adonnent à la recherche de l’idéal doivent, par tous les moyens, travailler au perfectionnement de leur organisation. Peut-être la grossièreté de la mienne, sous le rapport des arts, m’a-t-elle induit jusqu’ici en erreur sur beaucoup de choses. Mais l’heure de l’étude est sonnée, sans doute tous les élèves sont déjà dans la salle ; ne les faisons pas attendre. Je reprendrai cet entretien avec plaisir. Rien ne m’est plus doux que d’être redressé par ceux à qui je voudrais pouvoir tout apprendre.

hanz, l’embrassant et le prenant par le bras pour sortir.

Excellent maître, ame vraiment grande !

(Wilhelm et Carl les suivent.)
wilhelm.

Que de bonté et de simplicité !

carl.

Il est parfois bien original, mais on ne peut se défendre de l’aimer de tout son cœur.


Scène V.


HÉLÈNE.

Ils sont partis. Je vais ranger les livres et les papiers de mon bon maître. Oh Dieu ! que vous m’avez donné un noble ami ! — Pourquoi