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homme revêtu d’un titre éclatant. Elle veut être marquise ou duchesse, et, tant qu’elle n’aura pas trouvé l’occasion de satisfaire ce vœu impérieux, rien ne pourra la décider à l’abandon de sa liberté. Après de nombreuses et ferventes prières, Beauséant se retire confus et humilié. À peine a-t-il quitté le seuil de la maison où son orgueil a été si rudement éprouvé, qu’il rencontre un de ses amis nommé Glavis. Il lui confie son chagrin, et Glavis lui apprend qu’il a comme lui demandé la main de Pauline et obtenu la même réponse. Dès ce moment, Beauséant et Glavis forment le projet de se venger. On entend des cris de joie ; les deux amis interrogent le maître de l’auberge devant laquelle ils se trouvent, et apprennent qu’on célèbre le triomphe de Claude Melnotte, proclamé prince de la fête, comme le tireur le plus adroit ; car nous avons omis de dire que Beauséant et Glavis se sont rencontrés aux environs de Lyon. Le prince de la fête sera prince de Côme, et Pauline s’appellera, pendant un jour, princesse de Côme. Beauséant décide Claude Melnotte à le venger par un mensonge qui doit mettre entre les bras du jardinier poète la fille de son ancien maître.

Au second acte, nous assistons au mariage de Pauline et de Claude. Beauséant et Glavis tremblent à chaque instant que leur vengeance n’échoue, car ils ont dans le colonel Damas un surveillant très incommode. Le colonel Damas veut parler italien au prince de Côme, et Claude Melnotte ne sait que répondre, car il n’entend pas la langue de ses états. Cependant, après quelques secondes d’hésitation, il répond effrontément que l’italien prononcé par le colonel Damas n’a jamais été la langue des hommes bien élevés, des hommes de qualité, et Mme Deschapelles demande grace à son altesse pour la grossièreté du colonel Damas. Claude Melnotte, pour se dédommager du rôle misérable qu’il a consenti à jouer, se permet plusieurs espiègleries très vulgaires, mais qui seraient sans doute applaudies au boulevard comme des tours du goût le plus fin. Il offre à Mme Deschapelles la tabatière d’or que lui a prêtée Beauséant, à Pauline un jonc de diamans que Glavis lui a confié comme complément de son costume de prince, et les deux amis se consolent en songeant que la vengeance est le plaisir des dieux, et que, pour goûter ce plaisir, on ne doit pas lésiner. Pour échapper à la surveillance du colonel Damas, Beauséant fabrique une lettre datée de Paris, par laquelle un membre du gouvernement français le prévient que son ami le prince de Côme a été dénoncé, et qu’il ne peut demeurer plus long-temps temps à Lyon sans risquer d’être emprisonné. Mme Deschapelles, plutôt que de