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LA HONGRIE.

Ces deux dernières demandes ont été accordées sans restriction. La noblesse hongroise est riche et loyale, elle a dignement répondu au double appel fait à sa générosité et à sa bonne foi.

La première proposition était la plus importante à cause des nombreuses questions qu’elle devait soulever. Si elle n’a pas été acceptée dans toute son étendue, il faut reconnaître, cependant, qu’elle a fait faire un pas immense au bien-être des populations rurales. Les articles 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 12 du code sont autant de lois favorables aux paysans. La quotité des dîmes est réduite dans plusieurs cas ; les collecteurs seigneuriaux ne peuvent plus exiger un prélèvement égal sur les bonnes récoltes et sur celles qui n’offrent au laboureur que la faible récompense de ses peines. Comme il est de l’intérêt public d’encourager certaines cultures, on dégrève de quelques charges ceux qui s’y livreront. Les redevances les plus onéreuses aux pauvres étaient celles qu’ils devaient fournir sur les objets même de leur consommation journalière ; on les a supprimées. Toutes les petites dîmes sur le beurre, les volailles, les œufs, sont à jamais abolies. Le droit féodal, dans toute sa rigueur, pesait encore sur quelques localités. Ainsi, après avoir acquitté les charges qui les privaient déjà de leur revenu le plus net, les tenanciers étaient encore obligés de vendre les vins du seigneur pour obtenir la faculté de tirer parti de leurs propres récoltes. Enfin, l’ancienne législation sanctionnait à la fois une injustice et une barbarie tout-à-fait gratuite : les paysans, opprimés outre mesure par leur seigneur, ne pouvaient l’appeler devant les juges sans sa permission. Par l’article 13, ils sont autorisés, au contraire, à le citer directement et de leur chef. Malgré les efforts de M. de Széchényi, les corvées ont été maintenues, mais les jours de travail ne seront plus arbitrairement fixés ; le tiers au moins de ces journées doit être fourni l’hiver, pour que l’agriculture ne manque point de bras dans les saisons favorables.

Toutes ces concessions sont importantes ; sans nul doute, elles améliorent la condition du paysan, mais elles ne l’élèvent pas beaucoup au-dessus de celle du serf ; elles posent des limites au pouvoir seigneurial, mais il est difficile de les regarder rigoureusement comme de nouveaux droits acquis aux subordonnés. Leurs prescriptions sont à peu près résumées dans cette phrase triviale : Ne pressurez pas l’homme au-delà de ce qu’il peut donner.

Toutefois l’égoïsme est chose si commune, qu’il faudrait encore