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REVUE. — CHRONIQUE.

subi diverses modifications qui sont toutes en faveur du nouvel état, a été proposé derechef à la Belgique et à la Hollande, pour régler désormais leurs relations entre elles et avec l’Europe. Le cabinet de La Haye, qui, au mois de mars dernier, avait demandé à signer avec la conférence de Londres le traité primitif du 15 novembre 1831, contre lequel il avait si long-temps protesté, a donné immédiatement la preuve tardive de sa bonne foi en acceptant sans hésiter la nouvelle et définitive rédaction arrêtée par les cinq puissances qui s’étaient constituées les arbitres de ce grave différend. Quant à la Belgique, au moment où je prends la plume, elle paraît encore hésiter ; mais évidemment ce n’est plus du côté de la résistance qu’elle penche : le parti de la résistance semble avoir le dessous, et la transition s’opère plus tranquillement qu’on ne l’espérait d’abord vers le système conciliateur et pacifique. En deux mots, voici la position de toutes les parties. Le gouvernement belge est engagé, depuis le mois de novembre 1831, envers les cinq grandes puissances de l’Europe qui ont reconnu et garanti l’indépendance de la Belgique par un traité qui est son titre légal, traité moins favorable à la Belgique, plus onéreux, plus dur, que l’arrangement final dont les circonstances et les persévérans efforts de ses alliés lui ont obtenu le bénéfice. La Hollande qui, pendant huit années s’était débattue et contre la séparation et contre les conditions mises à la reconnaissance du nouvel état, s’est adressée à l’Europe, envers laquelle le royaume de Belgique était déjà engagé, pour lui dire que la prolongation d’un pareil état de choses lui était devenue insupportable, qu’elle succombait sous le poids de sa dette et de son établissement militaire, qu’elle cédait, qu’elle abandonnait ses prétentions, qu’elle renonçait à faire valoir ses objections anciennes contre tel ou tel article du traité, et qu’elle ordonnait à son ministre plénipotentiaire à Londres, M. Salomon Dedel, de signer l’acte déjà signé et ratifié par la Belgique. Puis, malgré les modifications, toutes contraires à ses intérêts, que la conférence a fait subir à cet acte, elle a effectivement signé. Et maintenant les deux adversaires, la Belgique et la Hollande, qui ne sont pas encore engagés l’un vis-à-vis de l’autre, le sont vis-à-vis de la conférence, arbitre suprême de leur différend. L’engagement de la première est de 1831, formellement renouvelé et confirmé en 1833 ; l’engagement de la seconde est de 1839. Mais, entre elles, les conditions ne sont pas égales. L’arrangement que la Hollande vient d’accepter n’est pas celui que la Belgique a pris en 1831. C’est quelque chose de plus ou de moins. Le traité de 1831 lui était plus favorable que celui de 1839, et néanmoins ce serait la Belgique, déjà tenue par l’acceptation de clauses plus rigoureuses, qui hésiterait aujourd’hui à reconnaître des conditions meilleures ; car ses obligations et ses droits n’ont été modifiés qu’à son avantage et au détriment de la Hollande, qui, si elle avait accepté le traité en 1831, au lieu du stérile honneur d’une vaine et coûteuse résistance, aurait maintenant à exercer contre le trésor belge et le commerce maritime d’Anvers des priviléges bien plus étendus.