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REVUE. — CHRONIQUE.
Et en Belgique, deux cent mille hommes ne seraient pas de trop pour faire face aux cinq puissances 
200,000
450,000

Tel est le contingent actif que nécessiterait le système de paix de M. Thiers. Il dépasserait grandement le chiffre de nos forces actuelles, et cependant il ne nous resterait pas un soldat pour l’Afrique, pour nos places fortes et le reste de notre système de défense !

Que M. Thiers vienne demander maintenant si ce qu’il nomme le système d’abandon a éloigné ou amoindri une seule difficulté, nous lui demanderons ce qui serait advenu des mesures qu’il eût prises conformément aux principes qu’il expose ! M. Thiers veut la paix. « On dit que mes amis et moi nous voulons la guerre, s’écrie-t-il, c’est un mensonge. » Soit, vous ne voulez pas la guerre, mais vous l’auriez, si vous gouverniez ainsi ; de même que nous ne vous accusons pas de vouloir la république, quoique vous fassiez, en ce moment, tout ce qu’il faut pour nous la donner, et avec elle la propagande, ainsi qu’une conflagration européenne.

Vous demandez aussi qu’est devenue l’alliance de la France et de l’Angleterre. Nous vous dirons qu’elle est telle que vous l’avez laissée, et peut-être plus solide encore, car des traités de commerce importans l’ont consolidée, et le plus important de tous, une convention de douanes entre les deux pays, s’élabore en ce moment. Ne semble-t-il pas, en vérité, que M. Thiers et M. Guizot aient emporté avec eux l’alliance anglaise quand ils ont quitté le ministère, et qu’ils nous la rendront à leur retour ? Qu’ils consultent donc leurs amis, s’ils en ont en Angleterre, qu’ils fassent demander à lord Palmerston ce qu’il pense de leur conduite actuelle ! Des hommes politiques, du plus grand poids, non suspects de partialité, et qui sont bien loin d’être défavorables à M. Thiers, ont rapporté d’étranges impressions à leur retour de Londres, et y ont entendu de sévères paroles à l’égard de nos hommes d’état de la coalition. On sent à Londres que la paix de l’Europe est intéressée à ce que la coalition échoue, et l’on y parle en conséquence. Si elle s’emparait des affaires, le moment d’agir conformément à ces paroles serait venu sans doute ; car, en Angleterre, les actes découlent des principes. La coalition fera bien de ne pas l’oublier.

Nous le répétons, c’est la guerre où mènent directement vos voies pacifiques et votre manière d’entendre les traités. La guerre, et dans quel temps ! Quand la France a tout à gagner par la paix ; quand elle n’a nul motif de se jeter dans la voie des conquêtes et des entreprises violentes. Voyez les progrès immenses que la France a faits depuis six ans. Elle les doit à la paix et au système que vous blâmez aujourd’hui. Quelles concessions, autres que l’exécution des traités, a-t-elle faites en retour ? Aucune. Qui songe à nous provoquer, à nous insulter en Europe ? N’a-t-on pas vu à Lisbonne, à Ancône, à Anvers, en Afrique, à la Vera-Cruz, que nous n’avons rien perdu de