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CRITIQUE HISTORIQUE.

tude de dignité ? Nous ne nous arrêterons pas plus long-temps à réfuter ces rêveries étymologiques. L’étymologie est un instrument délicat qui ne devrait être manié que par un esprit éclairé, juste et pénétrant.

Il nous est donc permis de conclure qu’il n’y eut dans la vieille Italie ni féodalité ni seigneurs, et qu’il n’exista dans l’antiquité ni bourgeois ni paysans.

M. Granier continue ensuite l’histoire des esclaves émancipés, et il les divise en deux groupes, ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent point. Dans le premier sont compris les industriels ; dans le second, les esclaves lettrés, les mendians, les voleurs et les courtisanes. Comme nous n’avons ni le loisir, ni la volonté d’entreprendre une réfutation de son ouvrage, nous nous contenterons de dire, pour ce qui regarde les industriels, que M. Granier de Cassagnac s’est essentiellement trompé en assimilant les corporations romaines aux jurandes du moyen-âge ; les premières, en effet, n’étaient qu’une distribution politique établie surtout pour opérer la fusion et entretenir l’harmonie des citoyens ; les secondes, au contraire, furent des associations spontanées qu’inspira le besoin de résister à la violence et à l’oppression. Quant aux mendians, aux voleurs et aux courtisanes, M. Granier ne leur a consacré que quelques pages fort superficielles, et où abondent les erreurs du genre de celles que nous avons relevées. Nous pensons donc que le lecteur nous saura gré de lui épargner l’ennui d’un pareil inventaire. Toutefois, dans le groupe nombreux de ceux qui se refusent à la tâche du travail, M. Granier a rangé une classe d’individus qui doit nous intéresser plus particulièrement. Nous avons dit, en effet, en commençant, que M. Granier avait aussi essayé de parquer les intelligences et de tracer la limite au-delà de laquelle, dans certaines conditions de l’ordre social antique, il leur était interdit de s’avancer. Or, tel est le but qu’il s’est proposé dans le chapitre intitulé : les Esclaves lettrés. C’est pourquoi nous pensons qu’il convient de traiter ce chapitre séparément et avec quelque étendue.

IV. — LES ESCLAVES LETTRÉS.

Est-il vrai qu’il y ait eu chez les anciens une littérature particulière aux esclaves, littérature qui n’envahit jamais celle des gentilshommes et à laquelle, en revanche, les gentilshommes ne touchèrent jamais ? M. Granier l’affirme et il s’est efforcé de le prouver. Nous avons une opinion contraire, et nous espérons l’établir avec quelque solidité. Mais avant d’engager la discussion, signalons d’abord une confusion dans laquelle est tombé M. Granier de Cassagnac, et qui suffirait seule pour ruiner sa thèse par la base. M. Granier a perpétuellement confondu les esclaves au moins avec des affranchis ; ce qui le prouve, c’est que parmi les faits qu’il avance, il n’en est pas un seul qui s’applique aux esclaves. Mais il a donc oublié qu’entre ces deux classes les préjugés des anciens mettaient un intervalle immense ? Ou, s’il s’en est souvenu pour les séparer dans l’ordre politique, comment, en les envisageant du point de vue littéraire, les a-t-il confondus ? M. Granier alléguera