Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 17.djvu/330

Cette page a été validée par deux contributeurs.
326
REVUE DES DEUX MONDES.

— Vous voilà pris comme dans une souricière, lui dit le caporal d’un grand sang-froid, parlant à travers les barreaux ; nous avons trois hommes tués. Nous allons démolir le jambage de la porte du côté opposé à celui où vous êtes ; ne vous approchez pas, les balles vont tomber sur nous ; il paraît qu’il y a des ennemis dans le jardin ?

— Les coquins de domestiques de Campireali, dit Jules.

Il parlait encore au caporal, lorsque des coups de pistolet, dirigés sur le bruit et venant de la partie du vestibule qui conduisait au jardin, furent tirés sur eux. Jules se réfugia dans la loge de la tourière qui était à gauche en entrant ; à sa grande joie, il y trouva une lampe presque imperceptible qui brûlait devant l’image de la Madone ; il la prit avec beaucoup de précautions pour ne pas l’éteindre ; il s’aperçut avec chagrin qu’il tremblait. Il regarda sa blessure au genou, qui le faisait beaucoup souffrir ; le sang coulait en abondance.

En jetant les yeux autour de lui, il fut bien surpris de reconnaître, dans une femme qui était évanouie sur un fauteuil de bois, la petite Marietta, la camériste de confiance d’Hélène ; il la secoua vivement.

— Eh quoi ! seigneur Jules, s’écria-t-elle en pleurant ; est-ce que vous voulez tuer la Marietta, votre amie ?

— Bien loin de là ; dis à Hélène que je lui demande pardon d’avoir troublé son repos, et qu’elle se souvienne de l’Ave Maria du Monte-Cavi. Voici un bouquet que j’ai cueilli dans son jardin d’Albano ; mais il est un peu taché de sang ; lave-le avant de le lui donner.

À ce moment, il entendit une décharge de coups d’arquebuse dans le passage ; les bravi des religieuses attaquaient ses gens.

— Dis-moi donc où est la clé de la petite porte ? dit-il à la Marietta.

— Je ne la vois pas ; mais voici les clés des cadenas des bras de fer qui maintiennent la grande porte. Vous pourrez sortir.

Jules prit les clés et s’élança hors de la loge.

— Ne travaillez plus à démolir la muraille, dit-il à ses soldats, j’ai enfin la clé de la porte.

Il y eut un moment de silence complet, pendant qu’il essayait d’ouvrir un cadenas avec l’une des petites clés ; il s’était trompé de clé, il prit l’autre ; enfin, il ouvrit le cadenas ; mais, au moment où il soulevait le bras de fer, il reçut presque à bout portant un coup de pistolet dans le bras droit. Aussitôt il sentit que ce bras lui refusait le service.

— Soulevez le valet de fer, cria-t-il à ses gens ; il n’avait pas be-