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L’ABBESSE
DE CASTRO.

Palerme, 15 septembre 1838.
I.

Le mélodrame nous a montré si souvent les brigands italiens du XVIe siècle, et tant de gens en ont parlé sans les connaître, que nous en avons maintenant les idées les plus fausses. On peut dire en général que ces brigands furent l’opposition contre les gouvernemens atroces qui, en Italie, succédèrent aux républiques du moyen-âge. Le nouveau tyran fut d’ordinaire le citoyen le plus riche de la défunte république, et pour séduire le bas peuple il ornait la ville d’églises magnifiques et de beaux tableaux. Tels furent les Polentini de Ravenne, les Manfredi de Faenza, les Riario d’Imola, les Cane de Vérone, les Bentivoglio de Bologne, les Visconti de Milan, et, enfin, les moins belliqueux et les plus hypocrites de tous, les Médicis de Florence. Parmi les historiens de ces petits états, aucun n’a osé raconter les empoisonnemens et assassinats sans nombre ordonnés par la peur qui tourmentait ces petits tyrans ; ces graves historiens étaient à leur solde. Considérez que chacun de ces tyrans connaissait personnellement chacun des républicains dont il savait être exécré (le grand duc de Toscane Côme, par exemple, connaissait Strozzi), que plusieurs de ces tyrans périrent par l’assassinat, et vous comprendrez les haines